Il démissionne. Ça te rend complètement hébété, perdu même - t'as plus l'habitude de gagner de cette manière. C'est toujours en trichant, mentant. Alors quand on est sincère, ça marche aussi ? Tu déglutis, t'empourprant malgré toi. T'as chaud aux joues, le visage toujours collé contre son dos. Les paupières mi-closes, tu te laisses aller à une tendresse étrange. Alec est doux, Alec est prêt et ça te rassure de voir qu'il apaise sa colère.

— « D'accord. »

Pour le travail, pour la robe.
Inspires, expires. La cage thoracique comprimée, tes doigts s'accrochent à l'intérieur de ses cuisses nues et galbées, et dans un souffle presque inaudible tu confesses des sentiments qui n'en peuvent plus d'étouffer, d'être réduis au silence. Ton coeur est muselé par ton esprit.

Alec se retourne et ça te force à te détacher de lui, te colle au mur juste derrière toi pour ne pas totalement t'effondrer. Tu l'observes, un peu dans un état second.
((Je t'aime Aslan))

Tu n'entends pas tout de suite alors un echo te répète à l'oreille:
((Je t'aime Aslan))

Tu entrouvres les lèvres, alors que ton regard au préalable moribond s'illumine d'une essence de vie nouvelle. Ton corps réagit entièrement - et tu baisses les yeux vers tes pieds.
Sa bouche vient effleurer la tienne, dans un baiser beaucoup plus langoureux.
Amoureux, presque (non, pas presque).
Tu ne comprends pas, ce n'est pas naturel.
Tu t'efforces de répondre à ses lèvres, encore confus par ses mots. Te libères finalement dans une respiration bruyante et éffrénée.

— « Tu m'aimes... moi ? »

Tu plisses les yeux.

— « Ce n'est pas... une vengeance....? »

Tu baisses les yeux, écartés. Les pupilles dilatées, tu portes ton poing à ta bouche.

— « Tu m'aimes, moi. »

Toi,
le monstre,
le fou,
le cruel,

ah.

— « Merci. »


— « Entièrement ? »

Tout de toi.
Il a dit : tout de toi.
Il aime tout de toi.

Tu baisses les yeux alors qu'il te soulève. Alec a beaucoup plus de force que toi, tu jalouses secrètement les capacités salvatrices de son corps - celles que tu n'as pas.
Tes doigts caressent et dessinent son visage, sa mâchoire. Il vient mordre ton col, enlève les boutons avec sa langue et embrasse ta peau. Tu frissonnes mais le laisses faire. En hauteur, tu te sens comme roi parmi les cieux ; l'espace d'un instant Alec est à l'égal d'un trône.

— « J'aime... »

C'est très difficile pour toi de t'exprimer là-dessus. Tu pourrais énumérer une liste méticuleusement bien rangée de tout ce que tu aimes chez Alec. Mais tu pourrais aussi faire exactement la même pour ce que tu détestes. C'est un tout et un rien.

— « J'aime que tu me laisses gagner. Et en meme temps je déteste. »

Tu le regardes de haut.

— « J'aime perdre face à toi, aussi. Et en même temps je déteste. »

Tu n'aborderas pas ses yeux, sa bouche, le creux de ses reins, ses cheveux, son parfum, son petit sourire en coin. Ça n'a pas de valeur, c'est juste une image que tu veux posséder, ranger dans une boite et sceller pour que ça n'appartienne qu'à toi.

Alec te tient toujours et tu t'échoues sur ses épaules, la tête blottie. Tu inspires, expires contre sa peau. Réfléchis à ce qu'est un métier respectable. Surement pas celui-ci.

— « Si tu restes ici, Lior sera intraitable. Je le connais bien. Viens chez moi quelques temps. A Neverland. »

Même si t'as encore des souvenirs qui piquent, dans cette maison...
Tu ne saurais tolérer qu'Alec reste ici un peu plus longtemps. A croire qu'il ne connaisse que cette chambre et celle des tavernes.

— « Pose moi, j'ai des fourmis dans les jambes. »

Vivre avec lui... oui c'est vrai que c'était pas dit comme ça mais c'est totalement ce que ça veut dire au final. Tu as l'air un peu absent Aslan, alors qu'il te repose sur le sol. Tu ne réagis pas quand il plaisante sur le ménage, te perdant silencieux et mutiques à des rêves éveillés où Alec demeurerait prisonnier de tes draps et de tes murs - ce pour l'éternité.

— « Uh ? .. Quoi ? »

Quand tu reprends conscience, il semble réfléchir à une reconversion professionnelle. Tu étires un vague sourire et lui tapotes l'abdomen avec bonhomie. Alec est beau comme ça, il est craquant à essayer de toutes ses forces de faire un effort. Cela signifie t-il donc que cette guerre entre vous va prendre fin ?
Votre relation a t-elle encore du sens sans celle-ci ? Sans le sang et les larmes, sans les cris et les déchirures, juste de baisers et d'abus ?

— « Tu... Oui, tu ferais un très bon barman. Et ne t'avise pas de me faire de la concurrence. »

Tu baisses les yeux pour regarder la robe échouée à ses pieds, remonte à son bassin dénudé - tu t'y attardes plus que de convenance, te mords la lèvre par réflexe. Inspire, expires.
Ne veut pas penser à Daisy en cet instant. Merde, il t'a coupé dans ton élan, le pique d'excitation redescend. Tu fronces les sourcils, cherches à le provoquer pour le punir d'avoir ainsi oser te frustrer.

— « Evidemment que je reste ici, je te vois le soir et elle la journée. Comme ça c'est parfait. »

Mensonge, elle pourrait bien crever.

Tu ne sais pas si c'est l'excitation de sa nudité qui te soumet à des idées malsaines mais sa pulsion meurtrière soudaine te coupe le souffle et fait gronder ton bas ventre. Tu restes sans voix, comme fasciné par la vision aussi funeste que charnelle qu'il t'impose, Alec déifié par ses pulsions animales.

Frissonnes au contact de sa langue et de ses mains, tu te prostres finalement contre la porte quand il recule vers la table de nuit. Tu bats des cils, angélique et siffles entre tes lèvres à la vue du couteau. Maugrées, boudeur, malgré la fascination qui persiste dans la voix. Tu aurais bien voulu le découvrir, avant. ça aurait pu pimenter votre jeu précédent. AH ! Quelle déception...

— « Je ne savais pas que tu en cachais un aussi gros... ça aurait changé beaucoup de choses. »

Tu as un problème avec les lames, en particulier les couteaux de boucher. Tu ne saurais expliquer pourquoi ils ont cet effet sur toi - mais la vue du sang sur la peau claire, les cris, les supplications. Le travail bien fait quand on découpe un corps avec attention. Inspires, expires. Tu avances vers lui pour le rejoindre.

Tu te mets sur la pointe des pieds, caresses son visage avec beaucoup trop d'affection. Tu le chouchoutes, t'accroches à lui comme un enfant en demande d'attention, en plein caprice.

— « Tu as dit... tu as dit que tu tuerais pour moi... tu avais promis... »

Tu respires dans son cou, plaques le bas de ton corps au sien pour qu'il sente à quel point la proposition t'emballe, malgré le tissu. Tu lèches sa nuque et murmures, pernicieux, les yeux grand ouverts. Tu cherches à atteindre le couteau qu'il tient, effleurant la lame du bout de tes doigts.

— « Je veux qu'on le fasse ensemble.... On pourrait... la capturer et la ramener chez moi... Et on la tuerait tous les deux... Qu'en penses-tu Alec ...? Tu veux t'amuser avec moi...? »

Comment peut-il seulement t'aimer ?
Toi même tu ne t'aimerais pas.
Si tu étais doté de raison et de morale ; mais tu ne l'es pas.

Il est beau avec son couteau. Il est beau tout court Alec mais dans cette position et avec ce regard c'est encore mieux - il se sublime et il n'est rien qu'à toi. Le plus beau bijou de ton tiroir, sûrement celui qui vaut le plus cher parce que tu l'arbores.

T'as le souffle coupé, bercé par sa voix mélodieuse, par les mots d'adieu qui soulagent des maux odieux : la jalousie, la possessivité, la rancune. Toutes ces émotions, essences du mal humain, sont apaisées par la promesse que vous scellez ce matin, à l'aube de votre nouvelle vie.

— « Alec... je veux faire ça au plus vite... »

La respiration saccade et tu te mets à trembler. Un filet de salive dégouline le long de ton menton alors qu'il te propose de toucher. Ni une ni deux, ton regard oscille de la lame à ses cuisses. Tu plisses les paupières et les fermes finalement après quelques secondes de longues inspirations.

— « Voilà ce qu'il va se passer, Alec. Tu vas la séduire, l'attirer dans un guets-apens et la ramener à la maison. Une fois sur place, on s'occupera de lui faire passer une bonne soirée ! Tous les trois hein, une dernière fois... »

Et tu regarderas; parce que tu as adores regarder.
Tu lui feras du mal; et tu le forceras à regarder.

Tu lui voles le couteau, en équilibre sur la pointe des pieds et le retourne pour le plaquer dos à toi, le bout de la lame pointé dans le creux de son menton.

— « J'ai très envie de toi. »

De te faire mal à t'en faire du bien.

— « C'est moi qui mène la danse aujourd'hui. »

Et l'autre main vient se saisir, d'autre chose.

Alec est devenu comme toi, aussi pourri que toi, aussi tordu que toi.
Ou peut-être que non, peut-être qu'il l'était déjà. C'est ce qu'il t'avait dit une fois... Tu fermes les yeux à cette pensée, le laisses jubiler. Ça fait gronder ton bas ventre d'autant plus que ton pouls s'accélère et tes joues s'échauffent de passion. Le désir du crime, ça rassemble les esprits malades et étires les sourires bizarres.

— « Aaaah Alec... Ne me parle plus d'elle ou je ne pense pas tenir très longtemps. »

Ses doigts et ses lèvres sur ta peau, tu lui mords avant de le retourner. Une main sur son torse pour le maintenir, tu sens son palpitant exagérer ses mouvements et son sarcasme t'arrache un rire nerveux et narquois.

— « Si t'as envie de moi prouve le alors. Soumets-toi à mes moindres désirs. »

C'est pour me garder sage.
Tu glousses et appuies la lame un peu plus, traces un sillon peu profond au niveau de son menton. Une goutte de sang coule sur la lame et t'arrache un soubresaut. Tu décides de lentement l'écarter pour poser l'ustensile délicatement sur le matelas, le tâchant au passage.

— « Pourquoi est-ce que j'en aurai besoin ? Tu es déjà sage. »

Et ça y est, ça recommence.
A croire que tu ne prends réellement ton pied que dans la tourmente et le chaos. Tu le forces à s'agenouiller devant le lit, épouses son dos quand tu l'enlaces - puis retires lentement le costume de prince que tu arbores fièrement depuis ce matin. Commences par le foulard au niveau du col, déboutonnes les manchettes en or, déserres le ruban et en profites pour attacher ses poignets. Petit sourire sadique alors que tes doigts tremblent. Il peut le sentir, t'es trop à fond dans ton rôle pour bien t'y tenir.

Même plus l'envie de jouer, seulement de le dévorer. Comme un Dieu engloutit le monde.

— « Alec. »

Alec est le monde.
Et tu en seras le nouveau Dieu.

Ses désirs sont des ordres, sont désordre - comme une symphonie désordonnée (désaccordée) qui bourdonne dans tes oreilles. Oh ça te plait, évidemment, mais ce n’est ni naturel ni logique. T’aime d’autant plus plier l’insoumis à tes caprices, savoir qu’Alec est autant brûlant à l’idée de prendre que de recevoir. Il n’a pas encore totalement idée de ce que t'es prêt à donner.

Tu ricanes, t’efforces d’être mélodieux quand tu roucoules à son oreille. Tu le tiens par les épaules et le forces à se retourner, les mains toujours attachées dans le dos. Supplice lent de tantale alors que tu ôtes tes vêtements avec lenteur devant lui. Dévoile peu à peu les parcelles de ta peau lisse et blanche. Avances le haut de ton corps prêt de son visage pour lui laisser (l’obliger) à le dévorer de sa langue, ce derme chaud et saillant.

— « Contemple-moi, alors. »

Appuies un peu plus pour ne pas lui laisser l’occasion de parler.

— « Dis-moi que je suis le plus beau. Le plus beau des hommes que tu aies jamais baisé. »

Frissons de plaisir, t’as la chair de poule Aslan. Finalement tu te relèves, baisses ton pantalon à tes pieds, hôtes tes bottes de cuir et prend du temps à plier les affaires pour les poser sur la table de nuit.

Le redresses pour l’allonger sur le lit, ventre contre draps. Tu caresses la courbe de ses fesses et y déposes des baisers chastes. Aussi purs que le sont tes lèvres, Aslan - sauf quand elles s'adonnent à la vulgarité.


Tu tournes la tête vers la table de nuit, là ou t'as déposé tes vêtements un peu plus tôt. Tu hausses un sourcil. Alec somnole à côté de toi. Il est fatigué et il a bien mérité du repos.
Peut-être que toi aussi, mais même après une heure t'es encore tremblant.
Songes à vos futurs méfaits, confrontes ton absence totale de remords ou de culpabilité. Tu devrais avoir honte ; et Alec dans tout ça ?

Pourtant, ce n'est pas l'opprobre qui joint tes mains sur ton coeur, c'est l'excitation nauséabonde du piège que vous allez confectionner ensemble, executer ensemble. Car vous l'êtes, ensemble ?

— « Alec. »

Coup de coude.
On est ensemble ?

Mais quand l'homme se réveille et te demandes ce qu'il y a - tu fixes le plafond.

— « Non, rien. »

Merde.