Azar se réveille avec cette sensation que sa journée va être chargé.
Il ne peut pas se permettre de trainer au lit.
Et ce, même s’il le voudrait.

Chaque matin c’est la même chose, il a mal dormi mais l’envie de passer sa journée au lit sans penser a rien, en se faisant simplement oublier le hante.
Il est tenté mais jamais encore il a franchi ce cap de céder à la tentation.

Alors il se lève, difficilement, il s’habille, péniblement et il se rappelle de ce qu’il a prévu.
Son carnet de commande contient celle de Violine.
Violine il la connait bien, ils évoluent dans le même secteur en quelque sorte mais au lieu de se faire concurrence ils ont choisi de faire un partenariat et ça, c’est plaisant.

Il faut dire que Azar n’a aucune envie de se compliquer la vie avec de la concurrence, les choses sont déjà bien assez pénibles comme ça.

L’avantage dans tout ça, c’est que, comme il a mal dormi, il sera fatigué et donc plus calme.
Il ne la laissera donc pas sortir.

Il prend son matériel et le voilà en route.
A vu d’œil, c’est déjà la fin de la matinée bien que Azar ait un gros doute, le temps est si étrange ici de toute façon et lui-même ne fait pas attention à l’heure.

Il se déplacera.
Et il grimacera un peu en arrivant en centre-ville.
Il préfère tellement son coin calme.

Mais bon, il a l’habitude, sa grimace se transforme rapidement en visage radieux.
Encore et toujours une facette.

Si bien qu’arrivé à destination, il franchit le pas de la porte avec son sourire forcé mais doux malgré tout. Il saluera celle qui doit à présent l’attendre :

« Bonjour Violine, j’espère que tu vas bien, je viens livrer ce que tu m’as commandé. »

Et il s’arrêtera là car il ne faut jamais en faire trop quand on joue un rôle.

Il a passé le pas de la boutique et il a changé d’expression.
Au cours de son trajet, il s’est déjà préparé à avoir ce contact, maintenant, depuis le temps qu’il la connait, Azar commence à s’y faire.
Il sait que Violine est une personne en qui il peut avoir confiance car elle ne lui a jamais manqué de respect et puis surtout elle reste un partenaire fidèle.

Azar sourit pour montrer un entrain qui en réalité n’existe quasiment pas.
Et Violine répond à ce sourire en lui renvoyant la question.
Evidemment c’est une question de politesse.

« Je vais bien merci. »

Ni plus ni moins car le faux semblant à ses limites – Azar ne peut pas non plus exprimer tout une prose de pensée mensongère.
Il va bien mais c’est relatif, son état mental est comme à son habitude préoccupée par cette idée de ne pas la laisser s’exprimer.  

Azar finira par suivre la commerçante jusqu’à l’arrière-boutique, il hoche la tête comme pour lui confirmer qu’il a bien reçu le message.

Et alors qu’il pose sa commande, alors que tout pourrait simplement s’arrêter là comme à chaque fois.
Violine a compris quelque chose et Azar le sent.

Après tout un comportement aussi faussé que le siens ne peut rester éternellement secret n’est-ce pas ? Il fallait bien s’y attendre.
Mais Azar est quand même surpris car il pensait qu’il pourrait encore profiter de cette facilité qu’il s’accorde en souriant beaucoup trop.

« J’ai eu une nuit agitée c’est vrai, mais rien qui pourrait être inquiétant je te rassure »

Il aura eu un moment de blanc avant d’enfin sortir cette réplique.
Toujours est-il qu’il se tournera vers Violine, toujours parait de son meilleurs sourire :

« Désolé si ça t’a inquiété. »

Parce que s’excuser c’est toujours le mieux pour ne pas attirer trop la suspicion de l’interlocuteur.

Il se tient face à Violine avec son sourire.
Son sourire faux.
Tellement faux qu’a force, c’est comme un copié collé a chaque fois qu’il la voit.
Elle le ressent.
Et elle le mentionne.

Et il clignera doucement des yeux.
Surpris ? Oui. Il s’attend à tout à partir de cette réplique. Il s’attend a des reproche en premier lieu, mais il n’en sera rien, elle continuera sur sa lancée, affirmant probablement que c’est normal de réagir comme ça.

Mais au fond, les faux semblant entre commerçant : bof.
Et il le sait, c’est pour ça qu’il craint la suite, il en déglutirait presque tant le stress monte en lui.
Finalement, elle prononce des mots durs mais juste. Et elle demande confirmation.

Qu’est ce qu’il aurait aimé esquiver cette question – s’il avait pu, il aurait fui, prétextant une urgence, mais il est coincé.

« C’est vrai c’est un défaut du au métier. »

Non, pas du tout. C’est juste qu’il cache sa nature de bête. C’est juste qu’il ne veut pas y penser à cet autre lui.

« Tu penses réellement que je cache quelque chose d’aussi important pour me forcer à sourire ? »

Azar n’a pas pu s’en empêcher. C’est comme pour s’assurer de savoir si elle a réellement compris sa nature. Il espère qu’elle lui répondra non.

… Mais en même temps si elle répondait oui : ce serait une bonne occasion de se créer une confidente.

Son sourire n’est plus, c’est un visage plein d’interrogation qui prend place.

Il se sentirait presque défaillir quand il l’entend.
Est-il si transparent que ca ?
Inquiètes-t-il autant malgré ses sourires ??
Lui qui a fait tant d’effort pour cacher son malaise face a cette chose au fond de lui, le voilà à présent démasqué.
Il ne répondra pas tout de suite.

Il a du mal à réaliser qu’en ce jour : quelqu’un ait compris qui il est réellement.
En même temps ça devait bien arriver un jour, Azar savait, elle savait comprendre les gens, elle pouvait comprendre leurs pensées.
Au fond, il avait peut-être espéré naïvement qu’elle ne lirait pas dans ses pensées.

« … tu sais donc. »

Un moment de pause, car il commence à réaliser complètement.
Il ne va pas fuir, c’est déjà trop tard. Alors il ne peut que répondre.

« Elle me hante en permanence oui. »

Il soupire un peu.
Il ne peut que lui dire.
De toute façon même si il lui dit rien, elle saura.

« Mais bon qu’est ce que j’y peux, de toute façon, elle est là donc je ne peux rien changer, je peux juste vivre le mieux possible. »

Limiter les dégâts, comme il peut, c’est comme ca qu’il vit en permanence.

« Voilà maintenant que tu sais, tu vois bien que rien n’est possible pour résoudre mon problème de toute façon, alors je ne peux que sourire pour attiser la confiance… »

Car si les autres savaient, peut être que son commerce ne prospérerait pas autant.

« Et maintenant je t’écoute, je comprendrais si tu voulais changer notre collaboration a cause de ca… »

La bête est pas quelque chose qu’on contrôle pour Azar.
Alors ce qu’on contrôle pas fait peur.
Et peut amener des changements.