— Ohooo, mais qui voilà ?

Babylone chantante s'arrête brusquement dans l'encadrure de la porte du bar qu'elle est entrain de quitter. Un sourire qui s'étire alors au bord des lèvres tandis qu'elle t'observe, plus loin, en pleine discussion avec deux de ses adorables adeptes. Si elle en semble ravie, il n'en est en réalité rien du tout -c'est qu'elle devine parfaitement, après tout le temps que vous aviez déjà passé ensemble elle et toi, ce que tu es entrain de leur dire. Elle pourrait sans doute mimer tes lèvres et prononcer les mots si doucereux avec lesquels tu les charmes si seulement elle avait un peu d'imagination.

Elle reste là quelques minutes encore, une main sur la porte et l'autre sur le mur, à vous contempler tous les trois. Dans son regard les flammes sont ardents, elle semble d'humeur taquine aujourd'hui. Alors, finalement, Babylone quitte sa cache pour s'approcher de vous. Chantonne toujours -sans doute est-ce pour ça que ses deux amis déglutissent en la voyant arriver dos à toi. Babylone est effrayante, pour ceux qui savent discerner sous les esquisses les menaces les plus terribles.

— Samuel, mon trésor !

Sans prévenir enlace ta taille par derrière avant de poser son menton sur ton épaule. Un regard noir aux deux DS paniqués, l'ordre est clair et ces derniers en profitent pour déguerpir aussitôt.

— Dis, tu veux bien arrêter de recruter mes hommes s'il te plaît ?

Elle les aimait bien, dommage qu'il faille les tuer maintenant.
C'est Alastor qui va râler.

Les doigts qui glissent contre tes vêtements tandis qu'elle entoure ta taille doucement, Babylone complice se fait silencieuse lorsque tu parles, encore. Encore si sérieux Samuel, elle apprécie. C'est amusant de t'écouter, non pas parce qu'elle y croit mais bien parce que tu es fou. Fou, monstrueux et dangereux. Vous n'êtes pas si différents tous les deux.

Un souffle au creux de l'oreille, le rire est léger et la voix presque chantante. Toujours lovée contre toi, dans ton dos et peu importe si tu détestes ça.

— Répète-les à l'infini, Samuel, je ne m'en lasserai jamais.

Sans aucun doute jamais.
Parce que Babylone dans sa folie est loin d'être idiote; elle sait.

— Ce-pen-dant. Le fait est que si ces hommes te suivent ils ne seront plus à mon service mais au tien. Ce serait dommage pas vrai ?

Tapote doucement ton torse du plat de sa main avant de s'éloigner brusquement pour se poser à tes côtés. Elle est gracieuse dans le moindre de ses mouvements, Babylone. S'il elle n'était pas tant elle, elle aurait pu faire de l'ombre aux anges.

— Ils n'ont pas la foi.
Ce ne sont que des miséreux.

Elle te lance un regard en biais après avoir croisé les bras contre sa poitrine, tranquille.

— Alors ? Tu vas tenter de me prendre à leur place ?

Essaie, Samuel.
Encore une fois.
Et puis encore et encore et encore.

Essaie à en mourir s'il le faut.

— Eh bien, si tu me connaissais vraiment tu saurais que je n'en laisse jamais aucune. regard en biais. Des miettes.

Ses hommes sont les siens, ses jouets sont ses jouets. Ceux des autres finiront sans doute sien ceci dit, si elle leur voue un jour seulement le moindre intérêt. Ces messieurs, donc, n'ont rien à faire avec toi -et tu as de la chance d'être tombée sur elle plutôt qu'Alastor aujourd'hui, crois le bien.

Un rire léger éclate malgré le sarcasme lorsque tu la déclares si bonne juge. Elle ne prétendra jamais l'être, tout comme elle ne se prétend pas supérieure à qui que ce soit. Es-tu seulement bien certain de la connaître, Samuel ? Le sourire qui s'étire à ses lèvres, elle t'invite d'un léger mouvement à avancer avec elle jusqu'à ce bar duquel elle vient de sortir.

— Hmm...

La malice aux lèvres pour seule réponse, ça l'amuse de te voir monologuer des choses qui n'ont à ses tendres oreilles absolument aucun sens. Elle pousse les portes de la taverne tranquillement sans prendre la peine de les retenir pour toi. Quelques pas à l'intérieur avant qu'elle ne tourne son buste dans ta direction. Viens-tu de dire qu'elle espérait ?

— Comment est-ce possible d'être si amusant et si ennuyant à la fois... s'approche alors rapidement pour s'accrocher à toi, passer ses bras autour de ta nuque. Samuel, mon brave tu n'as vraiment rien comprit.

La tête baissée qui mime un non dans un soupir résigné avant qu'elle ne relève les yeux pour s'encrer dans les tiens. Une seconde, deux secondes de silence peut-être, puis elle se détache brusquement de toi pour saisir seulement ton poignet et t'attirer à sa suite jusqu'à la première table libre qu'elle trouve. Elle s'y installe tranquillement avant de te toiser à nouveau.

— Qui est supérieur à qui ici, dis-moi ?

Maligne esquisse au bord des lèvres malgré le regard plus sérieux.

— Voilà un point sur lequel nous sommes presque d'accord.

Un léger sourire en coin pour étayer sa satisfaction. Le fait est que tu n'avais pas tort dans tout ce que tu disais, seulement. La supériorité, pour certains, relevaient bien plus que d'une chimère et il fallait être fou pour ne jamais l'avoir observé, ou ne pas y croire. Alastor faisait parti de ces gens-là, supérieurs au naturel, tellement qu'il en était monstrueux. Mais Babylone n'avait pas peur, et c'est bien parce qu'elle n'a jamais eu peur de lui qu'elle est à ses yeux ce qui se rapproche le plus d'une amie. Qu'il l'est aux siens également. Ce sont des notions biaisés par leur psychologie dérangées mais pourtant bien présentes, enfin peu importe.

Ses sourcils se haussent à peine après la pique non déguisée que tu lui envoies. Légère inspiration de la bouche, délicate et faussement surprise.

— Serais-tu entrain de te moquer de moi ?

Le silence un instant avant que les lippes n'esquissent un nouveau sourire narquois.

— Je ne sais pas si je dois rire ou pleurer, Samuel. Peut-être les deux ? Rire à en pleurer, pleurer à en rire, ce sont des états que je trouve formidables !

Mais là n'est pas le sujet.
Elle va pour reprendre lorsque l'on vous interrompt pour passer commande. Se charge dégager l'adorable monsieur vite fait préparer les boissons qu'elle a demandé avant de reporter son regard sur toi.

— Où en étions-nous déjà ? Ah oui. Ta foi et ta souffrance libératrice.

Pas du tout mais elle a décidé d'y revenir, son regard bien plus perçant sur toi alors tandis qu'elle s'accoude à la table, les doigts croisés en lit pour y accueillir son menton. Le ton et l'esquisse bien plus avides soudain.

— Les hurlements saints. Je veux t'entendre hurler, Samuel.
J'ai envie de te faire du mal.

Le frisson d'envie qui lui parcourt l'échine. Lentement sa langue pour lécher ses lippes.

— Maintenant.

Pour voir si ça te fais vraiment du bien.

— Ah oui ?

Et elle avait froncé les sourcils soudain, mordu ses lèvres pour en étouffer un maximum le gémissement qui s'en était échappé. Vos iris toujours croisés, elle n'a pas bougé Babylone -sourire grimace, léger léger quand son regard se fait provocant. Et dans sa tête alors le tambour qui s'assomme contre les parois. Ce n'est pas si fort, pas encore elle le sait. Tu peux faire bien pire que ça, pas vrai ? La faire réagir autrement que de surprise.

Les yeux qui se ferment un instant, le temps d'une inspiration. Babylone se centre sur elle-même, le crâne qui part en vrilles mais le corps toujours si détendu pourtant. Se plantent ensuite dans l'ébène si profond de tes iris. Serait-ce des flammes qu'elle perçoit à la lueur des bougies ?

Une esquisse de délice qui s'étire, un sourire.
Boom boom boom -assourdissants.
Boom boom boom soudain néant.

— Es-tu sûr de toi, Samuel ?

Car déjà elle se lève Babylone, le corps tremblant des derniers vestiges de vertiges dû à ton pouvoir; car déjà elle s'approche Babylone, pousse la table dans un grincement bruyant pour venir se tenir entre elle est toi. Se laisse glisser pour s'assoir sur tes cuisses, son dos contre la tranche de bois. Ce n'est pas assez.
J'en veux encore.

— Ce n'est pas juste.

La voix se veut innocente tandis que ses doigts parcourent tendrement la douceur de ta peau. Si pâle. Es-tu mort, Samuel ? Referment soudain leurs ongles sur ta joue, son autre main perdue dans tes cheveux.
Ce n'est pas assez.

Ne quitte pas le fond de tes yeux.
Si profonds.
Hypnotisant.

Elle ne compte plus le temps qui passe alors. Une seconde. Deux secondes. Dix. Vingt peut-être ? Pour qu'à mesure son sourire s'agrandisse encore encore encore. Carnassière Babylone, elle ordonne. Suis-moi. Abandonné entre deux respirations essoufflées, elle se lève alors pour sortir simplement sans attendre les boissons -parce que tu vas suivre pas vrai ? Parce que toi aussi tu le veux. Te retrouver dehors, avec elle. Au bout de cette impasse -cachés des regards indiscrets.

Tu es si grand, Samuel. Si beau Samuel. Si monstre Samuel.

Elle se hisse sur la pointe des pieds, les doigts agrippant le haut de ton vêtement pour t'abaisser également. S'approche alors de ton oreille pour y murmurer quelques mots, le ton bien plus sombre soudain. Sa silhouette pour épouser la tienne. Avide. Prunelles incandescentes.

— Je veux que tu hurles avec moi.
Recommence.

Tu demandes. A t-elle ce qu'il faut ? Elle n'en sait rien, elle n'a pas cherché tu sais, ne cherchera pas. À la place laisse le sourire étirer ses lèvres salement, entre malice, désir et folie. Ses doigts qui se referment sur le tissu de ton vêtement lorsque tu relèves son menton. Une main contre ton torse, l'autre sur le bras qui longe ton corps, au niveau du biceps. Vos regards qui se croisent, se croisent, se noient. En silence. C'est étouffant -la respiration qui se bloque alors, c'est soudain. Soudain comme la douleur encore qui la transperce, plus vive et le gémissement ne crie pas mais il est plus fort que le précédant, à l'intérieur. Ses doigts emmêlés aux tissus, elle serre si fort si fort, les doigts, les dents tout ! Ne te lâche pourtant pas des yeux malgré la douleur, malgré les grimaces qui se font plus légères désormais.

Laisse son corps se détendre petit à petit à mesure qu'elle s'y habitue. C'est étrange mais il lui semble que ce ne soit pas la première fois -et le pire dans tout ça c'est que ça a des airs de reviens-y.

Alors de l'index sur ton torse glisse jusque le creux de ton cou, les lèvres qui s'étirent doucement, Babylone sourit, le feu dans les yeux. Lentement elle se hisse jusqu'à toi, aurait adoré pouvoir frôler tes lèvres mais elle est trop fébrile pour te forcer à te baisser. Ce n'est pas grave, parce que tu lui donnes déjà beaucoup tu sais ? Comme ton regard si noir dans lequel elle ne cesse de choir encore encore encore.

— Tu trouves que mon regard est dur ?

Malice dans les mots tandis que ses ongles s'enfoncent dans la chair, plus fort plus fort toujours à en percer la peau bien plus profondément que les plaies de tes joues. C'est qu'elle les a toujours joliment manucurés, ses ongles. Ou bien est-ce ta peau qui est trop tendre, va savoir.

Un instant ses iris observent ses doigts à ton cou, le sourire qui se perd à peine, elle semble pensive en laissant échapper ce léger soupir empreint de dépit.

— Pourquoi diable es-tu si grand.

Redescend alors la belle sur le plat de ses pieds pour laisser glisser cette fois la main sur ton bras -griffe de son autre sur ta peau aussi fort que possible avant de la retirer également, sans se préoccuper du mince filet de sang qui s'en écoule. Dans un rire fluet porte son pouce à ses lèvres pour en sucer le peu de sang présent dessus. Un regard pour toi, l'esquisse qui s'étire encore.

Son autre main pendant ce temps s'est échouée le long de sa cuisse, contre le fourreau de son poignard qui ne la quitte jamais.

Ainsi posée, la tête à peine engourdie de ton assaut et son pouce toujours à ses lèvres, elle les étires doucement. Babylone est bien joyeuse aujourd'hui, tu en as de la chance, Samuel.

— Qu'est-ce que tu attends ?

Et les lippes s'étirent encore quand, à la lueur des lampadaires, ses iris semblent crépiter de flammes par millier. Elle se demande bien ce qu'elle attend, tu sais ? Peut-être un peu plus de passion, de murmures, de douleurs ? Oh. Bien sûr.

— Que tu te mettes à genoux. Tu le ferais pour moi ?

Un rire alors qui s'échappe, fluet et joyeux tandis qu'elle rompt de nouveau la distance pour coller son corps contre le tien. Pose la tête contre ton torse et sous le tissu les battements régulier de ton coeur lui arrachent un souffle de bien-être. Alors sa main libre te parcourt à nouveau, glisse sur ta hanche, se glisse sous le tissu pour remonter doucement et ainsi deviner, apprécier avec envie chaque parcelle de ta peau. Ses doigts pour dessiner les cicatrices qu'elle croise tranquillement, quand sa seconde main attrape finalement le poignard pour le sortir de son fourreau.

Elle écarte légèrement la tête pour la lever dans ta direction, toujours collée contre toi, toujours ses doigts à la chaleur de ta peau. Un sourire alors, elle prend le temps de savourer encore, encore, encore son désir grandissant. De sang. De toi. De vous -fais-lui mal comme jamais elle n'a eu mal Samuel. Tu veux l'entendre hurler toi aussi, pas vrai ?

Le soupir est à peine audible et soudain ses doigts ne te touchent plus. Babylone à l'esquisse si malveillante enfonce la lame dans la chair de sa main libre pour en laisser couler un épais filet de sang. Tend le bras à hauteur de ses yeux pour observer son œuvre un instant, compte les gouttes qui tombent au sol de nuit au rythme des battements de ton coeur. Puis elle sourit, satisfaite avant de simplement approcher sa main de ton visage et laisser couler le sang encore.

— J'attends, Samuel.

Encore encore encore, Samuel.