c’est si dur de grandir je sais mais même sans moi tu connais la fin
Les vices l'appellent inexorablement, pique cet intérêt malsain encore et toujours attiré par tout ce qui existe de sombre et de repoussant. As-tu seulement conscience des tiens, toi dont le sang effleure Time sans jamais l'atteindre ? As-tu seulement connaissance de leur noirceur, de leur profondeur ? C'est une chose que Lenore aimerait savoir, à travers cet attachement bancal qu'iel nourrit pour toi et pour ce que tu représentes. Combien de temps comptes-tu continuer ainsi, à masquer les remous qui t'habitent sous une blancheur qui ne te ressemble pas ?
Au fil des semaines, iel s'est fait·e ombre, ténèbres silencieuses, glissant dans ton sillage avec l'expérience de ceux qu'on n'aperçoit plus pour nourrir cet éternel vide insatiable au creux de ses côtes, pour y jeter tes gestes et tes mots, tes mimiques et tes possessions, tout ce qui fait de toi ce que tu es.
Mais la curiosité ne sait demeurer chaste : il lui faut toujours plus. Alors, aujourd'hui, les choses seront différentes, car il le faut. Aujourd'hui, iel te file avec des attentes précises au fond de l'esprit, iel guette cet instant où tu t'écarteras des rues passantes pour t'isoler de tes semblables.
C'est maintenant. Il n'y a plus personne aux alentours, rien que toi et ellui. Lenore sort alors de l'ombre, dévoile sa triste carcasse abîmée aux yeux du jour, se montre à toi – et appelle, dans ton dos, de ses intonations chantantes.
Morgan.Le nom roule sur sa langue, presque étranger. Un sourire déséquilibré glisse sur ses lèvres gercées, et un début de rire se coince dans sa gorge. Puis, un bras se lève, affreusement maigre dans sa manche noire et déchirée – un bras tendu vers toi, surmonté d'un doigt qui pointe dans ta direction, accusateur.
Tu fais semblant. Tu mens ! Tu n'es pas le fils du Temps, mais tu fais comme si. Tu mens, tu mens !Tu mens, car ni le blanc ni l'ordre ne te vont.