Roméo se demande quel temps il fait dehors, car dans cette piècee où on l'a enfermé l'absence de fenêtre l'empêchait de voir l'extérieur et ça l'embêtait quelque peu quand même. Peut-être devrait-il avoir plus peur ou même se creuser les méninges pour plaidoyer avec son épouse, mais à la place le voilà en train de fredonner un air qu'on a pas entendu à la cour depuis bien longtemps à se demander s'il verra au moins les étoiles une dernière fois avant de mourir. À quoi bon s'empoisonner l'esprit de négativité ou de désespoir quand ça voudrait dire donner la victoire à l'adversaire et c'était la moindre des choses pour un bon roi que de donner un challenge à son opposante. À vrai dire, le roi ne sait pas trop de quoi on l'accuse en fait pour qu'il en vienne à devoir en payer le prix de sa vie, mais bon est-ce qu'il était vraiment surpris? Pas vraiment.

Quand bien même sa mort serait injuste et cette vie devrait arriver à son terme, Roméo aime encore trop sa Juliette pour se faire à l'idée qu'il pourrait porter le premier coup pour la terrasser par colère ou vengeance. Ce serait si facile à faire, faire battre ce coeur qui a peut-être battu à l'unisson avec le tiens un jour de plus en plus vite jusqu'à ce qu'il n'en puisse plus et s'arrête. Ce serait si simple de lui faire gouter ce que c'était que de se faire tuer, mais pour l'instant il la laisserait gagner encore un peu, comme ça si un jour si l'envie lui venait de tout lui reprendre, au moins aura-t-il une justification à donner à sa confiance. C'est alors que les pensées se font interrompre en même temps que la mélodie tandis qu'il la voie devant lui et souris, après tout même dans le sursis de son exécution le roi de coeur pouvait bien profiter un peu des belles choses de la vie. Juliette ma douce, quelle délicate attention que vous me faites, venez vous asseoir ne restez pas debout comme ça Qu'il dit en montrant les fauteuils devant lui du menton, se disant qu'elle ne voudrais surement partager le canapé qu'il occupait présentement. Il est rare de vous voir en face de moi ces derniers temps, quelque chose ne va pas? La voix est de velours et les yeux sont fixés dans les siens tandis qu'il lui souris encore doucement.

Tout va bien si vous le voulez, il suffit de le demander. Riant et souriant, Roméo incline la tête vers elle, se retenant de lui prendre la main, celle à laquelle il s'était si désespérément accroché en dépit des siècles de souffrance infligée. Un dernier moment ensemble, un énième parmi tant d'autre qui arrive si souvent que ça en perd de solennité. Qu'il est doux de vous entendre dire cela très chère, mon coeur meurtri s'en retrouve soulagé. Qu'on dit à moitié sérieux, laissant le silence flotter quelques secondes avant de reprendre sur un même ton, la tête tournée vers le mur, un portrait d'un paysage qu'on a peut-être déjà visité il y a bien longtemps.

Pouvez-vous me rappeler la raison de cette exécution? Ma mémoire semble me faire défaut. Mielleux mensonge habillé de faux regrets, comme si l'on voulait comprendre pourquoi il était nécessaire d'en arriver là en refusant de la regarder et de faire face à la vérité. Peut-être qu'on cherche encore à la voir réagir différemment, espérant une conversation qu'il était trop tard pour que cela change quoi que ce soit. Vous avez l'air fatiguée, j'espère que vous dormez bien.

Ma présence ou non à vos côtés ne dépend que de vous, Majesté. Pourquoi se sent-il mal à l'aise d'entendre ça. Avant ç'aurait été avec joie qu'il aurait gardé ces mots près de son coeur en se disant que tout n'était pas perdu, mais quelque chose retient le sourire de devenir sincère. Et vous avez fait votre choix il y a bien longtemps maintenant. Peut-être est-ce le moment de redevenir sérieux, de révéler ce qui se trouve sous la surface pleine de rires et de sourires. Peut-être rien qu'un peu.

Jouer l'incompréhension n'est pas très élégant de votre part Juliette, après tout si je ressemble à qui je suis aujourd'hui est totalement grâce à vous. Que ce soit dans cette incarnation physique ou à la psyché fragmentée qui a parfois du mal à se remémorer ce qu'il s'est passé avant. Je suis devenu votre souffre-douleur avant d'être roi de Crims et vous en êtes devenue le tyran plutôt que la reine, voilà ce que je comprends. Des erreurs qui ont entraînées de longues décennies de souffrances pour tous. Vous êtes la seule responsable de ce cercle vicieux. Enfin, vous et votre orgueil bien évidemment. Les mots glissent des lèvres plus durs que prévu, Roméo se raidit en la regardant, se demandant comment pouvait-elle vraiment se poser la question. Pour qu'il y ait des cendres, il faudrait qu'il y ait quelque chose à brûler, ma douce. Le regard se baisse, colère, tristesse et mélancolie s'y disputant la place. Honnêtement, parfois je doute que vous m'ayez vraiment aimé ne serait-ce qu'un jour. Le secret est sorti et voilà qu'on le regrette déjà.