du sommeil qui s’étouffe
ne parvenant pas à trouver le repos niché aux creux des cauchemars
à ces matins que le soleil ne sait protéger

les yeux sont gonflés, lily-rose,
elle a pleuré ses peurs, perdu son courage
la nuit a tout volé
quand  l’aurore, trop clémente
lui offre un soupçon d’espoir
(mais elle sait
que tout cela se fane quand rencontre la lune)


vagabonde la fille aux cheveux blancs
ses pas trop confiants au sein des terres de feu
elle cherche, arpente,
sous ses prunelles le caractère hostile du peuple enragé
mais elle ignore
pourquoi, comment
rose et ses passions dangereuses
qu’elle garde pour elle, honteuse,
se garde bien de dire quand elle voyage en enfer

pourtant elle a connu halloween-city
et ses débauches furent sans égale
mais ici le moindre écart semblait
plus ardent
moins insidieux

c’est un plaisir éphémère qui s’estompe
ne laisse aucune trace
si ce n’est
un goût torride pour ses péchés
et elle ressert,
souvent.
le sourire coupable, mais silence

ce qui entrave son cœur
reste au royaume d’ici.

dans ses mains bouquet de chardons chauds
une bloody lily pour amuser ses yeux

les emplettes ne sont pas fructueuses
ici c’est difficile d’amasser des fleurs
en cendres ou brûlée,
c’est tout ce qu’on espérait trouver sur les terres sèches et ardentes
mais quelques raretés atypiques valaient le coup d’œil
(notamment la rose de porcelaine qu’elle recherche sans trouver)

à force de balade on aperçoit, un peu plus loin
la beauté des raisins,

c’est curieux
du raisin, ici.

marche soutenue sans l’effleurement de la crainte
brave le vent bouillant de la contrée
s’approche du domaine singulier
on voit plus loin sa silhouette fastueuse

atypique, ce contraste,
pour un pays mort.

lily-rose pas curieuse de ceux qui parlent mais de ceux qui n’ont encore rien dit
guète plus autour, se place à l’entrée de son royaume

décore dans son silence impérial
un bout du chemin,

par quelques branches,
on y attache ce qui est joli
ce qui l’est moins
chardons, bois secs,

de toute façon tout mourra demain
comme leurs espoirs.

et quand on vient à ses côtés lui demander de justifier sa venue
elle sourit, joli bourgeon gardé de ses pétales,
répond

« je viens voir qui s’occupe d’ici,
si on me le permet ? »

cela doit bien faire quelques heures
qu’elle s’oubliait
presque paysanne du pays de la colère
pourtant l’air trop consolé, rose
aujourd’hui
appréciait d’être vivante
se demandait même
si on lui volera cela

comme toutes les fins de journées.

on la guide l’ingénue curieuse
entre les murs de ces terres de feu

et laisse, traîner derrière elle
le secret de ses envies pécheresses
mais pas un mot
aujourd’hui tout cela devait se taire
ce n’était visiblement, ni le lieu, ni le genre.

et alors, quand on la somme de se présenter
petit rayon de bonheur
qu’il était rare de « bien » parler
lily-rose et les séquelles de son égo
gentille fille, trop pure pour les vices
on manipule les mots pour vivre un poème.

« lily-rose jacquet, enchantée. » laissa-t-elle pour sa curiosité
lorsqu’elle rejoignit la chaise qu’on lui indiqua.
« j’étais à la recherche d’une rose de porcelaine,
pas particulièrement jolie, mais la prestance… la prestance vaut assez souvent plus, finalement. » pour justifier sa venue sur ces terres à la réputation hostiles.

un sourire léger pour répondre à cette joie dont il s’habille si élégamment,
elle découvre la pièce d’un regard candide.

« j’espère ne pas vous déranger dans vos activités
mon passage est assez rapide généralement.
j’avais aperçu de loin la beauté de vos vignes – c’est important les belles feuilles,
mais vous le savez surement. » repose ses yeux gourmands sur la rareté gracieuse qu’il est. « merci pour votre hospitalité. »

le sacre de la politesse
à vif dans son sang

lily-rose aimait,
plus que ses tourments
la beauté fragile des paroles maîtrisées.

se saisit de son verre, lily-rose
comme on le lui a convié
souvenir de l’alcool
des soirées endiablées
(des coups, des pleurs)

arbore une esquisse de sourire
le doigt ganté glissant contre sa coupe
si belle, si pure
si destructrice.

elle trinque,
à défaut de le faire pour elle,
ce sera au plaisir des festivités françaises
méandres du passé.

« peu souvent,
mais goûter me donne envie. »
ses yeux perdus dans les reflets du vin
elle y trempe enfin une lèvre,
(espère ne pas l’embêter avec ses timides manières)
puis une gorgée, petite,
on voudrait pas être gourmande
ou avoir l’air désespérée.

et lorsqu’il fait l’éloge de ses employés (ou amis ?)
son regard suit le chemin de ses pupilles
admire ce qui au loin
fera plus tard, surement l’un des meilleurs breuvages du pays.

« l’union fait la force, disent-ils. »
mais rose n’y croit pas
quand elle pleure, seul, tous les soirs.

en déposant sa boisson contre la table
elle laissa glisser la tige du verre entre ses doigts,
s’amuse, s’occupe, se distrait à caresser
la table et le contour de son verre.

merci d’occuper ses esprits par la passion des fleurs.

« la rose de porcelaine… de ce que je connais, ses feuilles font un excellent antioxydant.
sinon elle fait une jolie décoration.
mais je me demande si, ici, elle n’aurait pas d’autre vertus… »

rien n’a de sens, ici, quand on cherche précisément
ce qui nous tenait à cœur par le passé.

« enfin, une fleur est une fleur, vous savez
seule elle est jolie
en bouquet elle est merveilleuse,
quoi qu’étouffée. »

écart de pensée
lily-rose souffle un sourire,
maladroite,
le pays rouge volait trop de son cœur
pour se battre à faire l’innocente.

« pardon.
hm…
monsieur ? pepperland ?
c’est sans prétention de ma part, bien sûr,
mais j’ai vu au loin vos vignes, tout à l’heure
je me demandais si nous pourrions aller les visiter, plus tard ?
je serai curieuse de voir quel choix de fleurs
vous avez choisi de planter devant vos rangées. »

pour les protéger de l’oïdium comme on se protège des peines
fleuriste avait le goût pour le travail parfait
et des bourgeons pour se couver.

à partir
des racines
dit-il. avec raison.

car s’il n’y a que les feuilles
qui s’entremêlent
alors à quoi bon ?

quoi que.
finalement… on peut tout couper aussi.

alors les lippes arquées finalement
s’éclipsent

elle sait, rose, que les couteaux sont toujours trop proches de ses émois
et au moindre coup de vent
clap
rideaux
et les fleurs tombent.

mais son clin d’œil réussit à raviver un brin d’espoir
alors l’air morose s’envole
laisse trainer ici, avec lui
le plaisir un peu badin
celui qu’on garde spécialement pour les terres de feu.

quand soudain il se lève
son visage suit sa silhouette
si élégant, quelle grâce
mais elle n’est pas jalouse
non,
admirative, lily-rose
monsieur pepperland est un bouquet raffiné.
elle pourrait l’admettre sans honte.

« tutoyer, si vous… tu le souhaites,
mais comment dois-je t’appeler, alors ? »

la politesse prenait doucement son congé
sans pour tout emporter avec elle
il y a toujours la finesse et la bonté
cet assortiment de courtoisie qui laisse l’atmosphère douce, et docile ;

et même
si les noms sont choyés dans sa bouche
elle concède
pour lui, cet étranger familier
une rose
peut-être même une lily, s’il sait s’y prendre.


alors elle s’élève, aussi
plaçant une paume dans la sienne
l’envie n’est pas tactile mais avec sa présence
rosie ne craint pas de braver ses limites ;
et puis, il faut avouer, aussi
que les gants protègent.

« les arbres de neiges auraient apporté un joli contraste
en plus de protéger.

je t’apporterai un bulbe si j’en trouve,
sinon une composition de fleurs séchés. »

c’est plus facile
d’imposer son souvenir
quand on a
les pétales, mêmes fanées
qui perdurent.

« et je serai vraiment ravie
si mes idées te plaisent
d’apporter un peu des bourgeons du pays blanc pour décorer ton domaine. »

qu’il est
entier
dans ses gestes dans ses yeux qui pétillent
dans ce sourire si simple
qu’on volerait volontiers aux enfants

il a l’air protéger du mal
pourtant tout entouré
alors comment fait-il ?

pour croire sans démonstration aucune
que les arbres de neiges
puissent protéger quoi que ce soit
alors qu’elle de son côté
ne parvient même pas à protéger
les bouquets qu’elle envoie
à travers la pièce

silence.

« ellen. »

l'epimedium
ellen willmot ; très légèrement teinté du rouge
terres de feu
son feuillage garde néanmoins
ses couleurs, et son indépendance.

en y pensant elle à ce rire
court mais heureux
les gens sont certainement tous des fleurs
qu’on ose pas cueillir, n’est-ce pas ?

« c’est joli. ça va au gré du vent, mais ça garde
ses deux l attaché(e)s. »

et elle repassera volontiers
ne serait-ce que pour qu’on lui dise
qu’on est ravis de la voir
même si elle se déteste d’être en vie.

« je ne saurai te remercier pour m’accueillir si gentiment.
me laisser admirer tes vignes,
et les fleurs qui les protègent.
jamais je n’aurai cru trouver
une sensibilité pareille
au pays rouge. »

les pupilles voyagent
découvrent
elle a le regard qui l’abandonne
pour regarder le ciel à travers la fenêtre
heureuse pour la première fois de constater
que c’est le même bleu qui le soir
devient noir pour que l’on puisse
fermer nos paupières et ne plus voir
la colère des pays en guerre.

qu’elle
lui offre
sa soirée ?

rosie qui n’abandonne pas son paysage bleuté
presque amoureuse de se dire
que la même nuit les berce, peu importe l’horizon
se dit soudainement
alors que ses yeux se figent
ronds

qu’être ici pour la soirée
ne serait
qu’un doigt au feu
alors qu’elle
donne si souvent
sa main au brasier.

sans y répondre tout de suite
elle le regarde à nouveau

duchesse
pourtant tant de douceur
quand coule en elle
tant de bataille ?

invitée elle suit sa démarche
déambule à ses côtés dans sa demeure merveilleuse

« avec plaisir, ellen,
mais
je pense vous quitter après le dîner »
(les nuits nous kidnappent)
« ma boutique m’attend
au royaume d’ivoire. »
(les larmes avec)

car rose
n’ose pas
faire faux bond à ses terreurs
qui si patiemment guettent
que les étoiles se reflètent en ses larmes.

« mais je reviendrai,
assurément.
j’espère pouvoir vous aider à décorer
votre maison,
aux couleurs des saisons. »

qu’on en fasse
le trésor
d’une paix qui s’installe
qui grandit, qui survit
au milieu
de trop de colère.