Contre les murs de pierre dansent les flammes tremblantes des bougies disposées un peu partout dans la salle, seuls remparts contre l'obscurité qui recouvre la cité de la nuit éternelle. L'endroit n'est pas très grand, et pourrait presque être convivial s'il n'était pas si peu éclairé et si imprégné de l'aura mortuaire de son propriétaire. La poussière s'accumule ça et là, ternissant d'épais carreaux qui peinent déjà à laisser entrer la lueur de la lune, et les fleurs qui décorent les quelques tables sont fanées. C'est ainsi qu'iel les préfère, les vivantes sont lassantes.

Parmi les âmes qui peuplent le bar se trouve un visage connu, qu'iel observe à la dérobée d'un œil fébrile à chacun de ses passages. Toujours du silence, jamais rien que toi et ton verre, mais il y a quelque chose de vif dans ta posture qui læ fait se questionner – et les dieux savent que l'Enfant Perdu finit toujours par céder à la curiosité. Ce semble être aujourd'hui : iel s'approche, le pas irrégulier, l'ourlet noir de la jupe battant ses chevilles nues, corneille intéressée dans son domaine d'ombres. Le plus singulier est que ton maître læ fuit, alors toi, que fais-tu ici ?

Lenore t'as vu, chaque fois où tu es venu.

Silence qui tombe, et tête qui se penche sur le côté, dans un geste presque animal, comme tentant de sonder ce qui n'est pas dit.

Y a-t-il quelque chose que tu cherches, apprenti créateur de lucioles ?

Les ténèbres peuvent-ils t'aider, toi qui manie la flamme qui les fait reculer ?