Le décor de ce souvenir est posé, c'est le moulin rouge durant les belles années. La luxure, l'odeur pestilentielle des corps trop parfumés, tu ne sais pas vraiment si tu seras capable de les supporter à long terme, Aslan. Daisy et ses sourires, les fauteuils en cuir rouge, les clients réguliers. Tout ces détails rendent la vie moins monotone, alors que tu te tiens droit devant la porte - chien de garde immobile à l'épée décorative. AH ! Si seulement ils savaient que tu peux à peine dégainer. Que tu es une catastrophe au combat. Mais ce n'est pas grave car c'est avec bienveillance et reconnaissance qu'on te respecte, toi, le prince charmant qui veille sur une panoplie de princesses (déchues).

Tes yeux froids et indifférents croisent celui du lieutenant Moore. C'est la deuxième fois qu'il vient cette semaine. Qu'il puisse alterner homme ou femme, prendre ce qu'il vient - tu trouves ça dégoutant. Une honte que le service militaire du royaume de coeur s'abaissent à pareils vices. Tu ne diras rien Aslan, car ton avis n'est ni requis ni demandé mais tu n'en penses pas moins quand vos iris se remarquent et que ton sourire s'élargit, ta tête qui s'abaissent - main sur ton manche.

— « Bienvenue au moulin rouge, sir. »

Un client de plus.
Une femme recouverte d'une fourrure sort en même temps.

— « Revenez quand vous voulez. »

Un client de moins.
Et l'accueil du moulin qui se fait plus silencieux, entre quelques soupires perçus derrière les portes fermées. Mère Grand n'est pas présente et Lior enfermé dans son bureau. Tu te retrouves seul dans l'immense espace, à veiller devant les chambres pour que personne ne vienne déranger les pupilles dans leur travail. Daisy sort la première et s'étire après avoir déposé un baiser sur la joue de son client - à son attitude (elle te remarque et t'interpellais) tu lui réponds d'un sourire appuyé et rassurant. La déshabilles du regard, et dans ta tête se dessinent des pensées déplacées.

Un client sort en trombe d'une autre chambre, visiblement satisfait mais très agité. Tu t'es décalé pour le laisser sortir et l'intendant fait son apparition pour le prendre en charge. A l'intérieur de la chambre, la fille pleure. Tu fais signe à Daisy de rester dans le salon pour occuper les potentiels clients, et pénètres la cabine pour rejoindre la pauvre enfant.
Tu poses un genou à terre, alors qu'elle est assise sur le bout du lit. Poses ta main sur sa cuisse et lui relèves son menton du bout de ton épée.
Lui demandes pourquoi elle pleure - ça t'émeut réellement, Aslan, de voir un corps aussi pur tâché d'un désespoir aussi grand. Répugné par l'odeur de la chair et de la transpiration, mais tu prends sur toi.

— « Ça va aller. »

Elle t'explique qu'il a été brutal, trop brutal. Qu'elle a mal et ne veut pas recommencer pour la journée. Tu jettes un regard par dessus ton épaule, vérifie que vous êtes bien seuls.
Comment fait Lior déjà, quand il veut convaincre ?

— « Mais ta journée ne fait que commencer, je ne comprends pas. »

Elle secoue la tête de droite à gauche, en signe de négation.

— « Si tu n'es pas capable d'encaisser un seul client, c'est que tu n'es pas une valeur sûre. Pourquoi est-ce que je devrais du coup investir du temps à te protéger ? »

Tes doigts sur sa cuisse remontent pour frictionner sa peau. C'est la première fois en ces lieux que tu t'accordes un tel pouvoir, et tes yeux écarquillés la guettent - la mettent mal à l'aise. Tu uses et abuses de ton don pour calmer le jeu, et lui faire croire que c'est elle le problème. Pas toi, comment le pourrais-tu ? Lèves ta main pour cajoler sa joue.

— « Si tu te calmes et que tu reprends le travail, je ne dirais rien à Lior. Et ainsi, nous deviendrons des amis très proches, ceux qui partagent un secret. »

Diriges le manche de ton épée vers les plis de sa jupe, et tu soulèves avec lenteur pour détailler ce qui n'a rien d'attrayant (pour toi).
Elle en tremble mais hoches la tête, tu entends un craquement du plancher derrière toi. Te retournes brusquement, toujours accroupi devant elle.
C'est le lieutenant... Moore, c'est ça ? Tu restes quelques secondes immobile à le contempler, Aslan, à te demander depuis quand il est là et qu'est-ce qu'il a entendu.

Face à un client tu ne dois pas faire de vagues. Tu te redresses d'un coup, replaces correctement ton épée à la ceinture et l'observes silencieux - comme une ombre s'adresser à la prostituée. Tu plisses très légèrement les yeux, sans sourire et serres délicatement les doigts sur le manche de l'épée que tu viens d'accrocher. Il ose ! Il ose donner des indications à votre employée, comme s'il travaillait ici. Pour n'aggraver aucun de ses soupçons tu le laisses faire et t'écartes lorsque la dénommée Olivia passe devant vous pour rejoindre le salon en compagnie de Daisy.

— « Et prends soin de toi ! »

Que tu lâches d'une voix douce et bienveillante alors qu'elle traverse l'encadrement de la porte, vous laissant seuls, en tête à tête.
Tu n'apprécies pas du tout le ton qu'il prend, Aslan mais penches la tête en étirant une risette risible et surtout factice. Inspires, expires. Tu fais un pas vers lui, sans honte, sans pudeur et sans une once de culpabilité à afficher sur tes traits trop parfaits.

— « Ne suis-je pas censé quoi ? »

Demandes-tu avec innocence, alors que tu actives ton pouvoir.
Qu'il te voie désormais aussi blanc que le linge et qu'il comprenne qu'au fond de lui, ce qu'il a entendu n'était qu'une mauvaise interprétation.

— « C'est un malentendu, Lieutenant Moore. Je ne suis ici qu'un garde du corps. Bien évidemment que je les protège. »

Encore un pas en avant, tu te positionnes désormais face à lui. Un lieutenant, ça ne te fait pas plus peur que ça - bien que l'armée dans vos pattes (dans les tiennes) ne t'enchante pas des masses. Tu poses une main sur le coeur alors que tu t'introduis déjà dans le sien, pour corrompre ses jugements.

— « Aslan Charming, pour vous servir. »

Et d'un salut respectueux, tu abaisses la tête en signe de respect - mais sans arrêter de sourire.
Comme si rien ne t'atteignait.

Tu conserves ton sourire et ton assurance, assuré d'être cette fois-ci bien interprété par cet individu à l'allure plus que douteuse. Sa posture et ses jugements ne t'inspirent aucunement confiance et ton manque cruel d'empathie le condamne quand bien même tu ne le connais pas réellement. Tu t'avances vers lui jusqu'à ériger une proximité presque malaisante,
Il est enchanté, qu'il dit - alors que lui même s'incline en retour. Tu aurais pu t'arrêter là, jouir de l'ascendant que te confère l'immunité, mais sa tirade suivante te fait lentement relever la tête.

Tu as perdu ton sourire Aslan et Clay Moore peut le voir lentement disparaitre sur ton visage. Tu plisses les yeux légèrement et tentes d'activer ton pouvoir de nouveau. Tu ne te laisses pas démonter pour autant Aslan, profondément convaincu au fond de toi que tu n'as rien fait de mal et que ce sont les gens autour de toi qui sont malades. Il n'aura fallu que d'une demi seconde pour perdre le contrôle avant que tu ne le rattrapes au vol avec brio. Tu penches la tête usr le coté et relèves le menton pour le prendre de haut.

— « Des menaces ? Je ne sais pas ce que vous insinuez à mon sujet, lieu-te-nant (ce mot est prononcé de manière saccadée et agaçante) mais soit vous avez cru mal entendre soit ce sont des accusations graves envers ma personne que de supposer que j'ai pu dire quoi que ce soit de déplacé envers cette employée. »

Il veut quoi celui-là ?
Tu serres discrètement le poing au niveau de la taille. Hausses un sourcil lorsqu'il mentionne un des putes du moulin - Alec c'est ça ? Ce type détestable et bien trop imbu de sa personne.

— « Alec, hm. Très bon choix. »

Passes à côté de lui pour le contourner, mais t'arrêtes à son niveau pour murmurer d'un air doucereux - le ton employé est plus que vicieux, quand tes intentions ne se trahissent pas encore sur ton visage.

— « Quand on aime taper dans le bas de gamme. »

Tu recueilles sa réaction d'un rictus amusé, voir taquin. Bloques la porte en te plaçant au travers sur le pas de celle-ci, les bras étirés de chaque côté et les mains de part en part de l'encadrement.

— « C'est curieux, à vous regarder au premier abord, on n'imagine en rien que vos goûts se définissent d'une telle nature. Ça en dit long sur votre politique de jugement. »

Tu campes aussi bien sur tes positions que sur la moquette du moulin rouge, ne bougeant pas d'un millimètre de ton emplacement - quand bien même ton corps fait usage de barrière pour le lieutenant Moore. Tu plisses les yeux, lui révèles l'espace d'une seconde ton véritable visage. Celui d'une haine démesurée à quiconque te perce à jour. Quand il te questionne sur ton accent, tu hausses un sourcil.

— « Je ne proviens pas de ce monde, à l'origine. J'en déduis que vous êtes né ici, vous, n'est-ce pas ? »

Tu étires un sourire aussi radieux qu'ingénu, lui rétorquant une question sur le même ton doucereux qu'il a osé employé.

— « Comment vivez-vous le fait d'avoir une date de péremption, lieutenant ? D'etre face à des êtres qui ne vieilliront plus jamais, quand vous, vous vous risquez à tomber en poussière d'une minute à l'autre. »

La menace est à peine perceptible, mais bien réelle pour autant.
Tu as les épaules crispées quand il parle d'essayer, d'étroitesse d'esprit. Ce dialogue n'a aucun putain de sens, vous ne faites que vous renvoyer la balle sans attendre qu'elle touche l'autre. Tu te détends cependant quand il en vient lui à craquer et à s'abaisser au même jeu que toi : celui de l'avertissement. L'intimidation te fait gronder mais tu lui accordes une énième révérence et t'écartes pour le laisser passer.

— « Veuillez me pardonner, Sir. Je vous laisse à vos occupations, en espérant que votre expérience au moulin n'en soit pas affectée. »

On se reverra, crois-moi.


Tu le laisses rejoindre la loge numéro 5 et te places devant par la suite. Le couloir des chambres est vide car elles sont toutes occupées. Du monde commence à s'installer dans le salon mais tu sais que l'intendant accueille les clients. Toi, tu dois protéger les filles (et les garçons) de potentielles agressions
En profites pour espionner, Aslan, car l'art de bien voir est celui que tu excelles le plus.
Alors au rythme des soupires étouffés par les portes blindées, tu colles l'iris à la serrure pour observer les mouvements des corps, la chair qui se tord - ah ! Quel délice honteux, tu aurais préféré qu'il s'agisse d'une belle femmes aux courbes gracieuses. Le plaisir masculin n'a rien de pieux ou d'harmonieux.

Une heure avait fini par passer, et la porte s'ouvre. Tu ne bouges pas de ton poste, n'accorde pas un regard à Alec (ce sale chien) qui sort torse nu pour rejoindre les vestiaires. C'est au tour du lieutenant Moore de sortir et tu rends son sourire chaleureux, alors que tu inclines légèrement la tête quand il passe devant toi.

A ta hauteur, tu te racles la gorge pour l'interpeller - du moins pour qu'il s'arrête et se retourne.

— « La maison aimerait vous faire cadeau. »

Pendant la garde, tu avais réfléchi à ce qu'il t'avait dit avant que vous vous sépariez. Il ne verrait pas ses enfants mourir... il ne serait pas remplacé. Tu étais resté stoïque face à ses affirmations mais n'avais pas eu le temps de relancer la discussion. Ce n'était ni un débat ni même un échange banal - c'était des menaces et rien de plus, rien de moins. Le lieutenant les avait surement compris, au vu du sourire qui ne décollait pas de son visage.
Ça te rend malade les gens comme ça Aslan, encore plus que tu ne l'es déjà naturellement. C'est terrible, cette envie de jouer avec lui, de le traquer jusqu'à être témoin du fait qu'il a tort.

Dans son dos, c'est une idée qui a eu le temps de mourir qui surgit soudainement. Tes yeux s'écarquillent de folie, le rictus allongé quand il se retourne. Tu as déjà gagné. D'une voix douce et enrobé, tu t'invites à côté de lui pour marcher à ses côtés.

— « Le moulin veut vous remercier de votre fidélité. Ainsi vous êtes conviés à une petite dégustation de vin avec les filles et d'autres clients cet après midi. »

Tu n'actives pas ton pouvoir. Innocent tu le seras pour de vrai - tu ne comprends pas pourquoi il ne fonctionnait pas tout à l'heure mais tu es prudent, alors tu ne réitères pas cette erreur.

— « Suivez-moi. »

Tu passes devant pour le guider jusqu'à un petit salon VIP où sont installés des chaises hautes (toujours rouges) ainsi qu'un minibar dont la devanture est couverte de moquette pourpre. Il y a plusieurs bouteilles avec quelques verres disposés.
Cependant, vous êtes seuls.

— « AH ! Il semblerait que nous sommes les premiers arrivés. Que diriez-vous de commencer à boire avec moi le temps que les autres nous rejoignent ? »

Tu te places derrière le bar et attrapes une bouteille, rapproches un verre que tu ne quittes pas des yeux et après enlevé le bouchon, tu verses le liquide dans la coupe.
Lui tends, confiant.

— « A votre santé. »