susan remonter la distance
le son des pavés blancs le son du sucre cassant et des froids purs
n’est pas le même que les routes rouges. rien n’est le même ; le trajet entre les heures et les fleurs tous les jours toutes les nuits semble résonner sous les pieds avec nette différence. c’était, ce sont les traversées de nos paroles.

royaume d'ivoire a ton nom. plus chaleureux que dans notre enfance, alors.

le rythme des autres. désynchronisé avec tout le monde. bonjour, comment allait votre chien ce matin, a-t-il encore osé manger votre carré de chocolat rose voudras-tu qu’on aille à ce petit café prendre une tarte au chocolat ?

nous avons la rumeur des fruits qui roule toujours en bouche.

et tout autour la rumeur des vies quotidiennes. jusqu’à l’entente de son nom. on aime voir l’écho de ta voix avant ton visage. une percée dans le jour comme les rayons dans les nuages.

sourire velours. un. deux. trois.
nous y voilà. couler le scintillement des yeux vers la porte fermée. vers le silence du départ. des départs.

formalité douce.

c’est amplement suffisant.

te regarder.

elle me fait penser à un de tes gardénias.

ici. maintenant. ta boutique et son silence d’espace. le croissant de lune en arche. croissant pour sourire. l’amour qui ne se dit pas.

susan, de la poche de sa veste, avoir peut-être quelque chose. pour remplir ton panier d’osier. débuter l’entrée.

un pas. y déposer sans bruit
une clé.


la vie s’ouvre sur les souvenirs. à neuf heures trente les fleurs ont éclos des croisées de chemins.

je te reconnais, rose.

le sourire d'avant. de toujours.

j'aime l'image de nous. nous qui regardons ta boutique. tu l'imagines gardénia. et j'en souris. nous ressemblons à une photographie. un jour, une nuit, quand tu viendras contempler la mer avec moi

je te montrerai celle que j'ai prise. d'un coin de ton univers. là où repose ce vase aux allures dansantes. comme le lierre aime à grimper en courbes heureuses. cette photo ; elle me dit quelque chose de toi. tu m'as semblé ce jour-là avoir oublié comment rire.

aujourd'hui, rose ; ta mélancolie a des airs de pluie d'été. avec le soleil qui réchauffe la peau.

si. tu as beaucoup changé.

je le vois dans tes yeux. dans ta posture qui se veut la même. dans ta posture qui sous les gestes a enlisé ce que t'apprend la cour. un corps fait d'archives.

c'est pour ça que je te reconnais.

tu cueilles au sol. j'ai les yeux qui cueillent les nuages. je souris à les voir qui se façonnent étirés comme des tiges. avec leurs épines.

tu dis. j'écoute. j'écoute le peu de mots qui racontent autant d'années. il y a des histoires derrière tes paroles que j'ignore et ça me plaît. de celle que j'ai vu cassée à la porte d'entrée. tu ressemblais davantage à une coupe de fruits éclatée, vidée. j'aime l'invisible que tu as construit.

le bois de la porte ; ta boutique. sous ma main dit beaucoup encore. de ceux qui vont et viennent aux nombres de fois la clochette résonne pour témoigner des traversées d'existences.

lire les livres avec l'envie de tout savoir est vulgaire. j'aime mon savoir habité par ce qu'il exclut de connaître.

je souris. te rejoins pour entamer la route. la distance est une demeure, ta boutique comme départ et quelque part comme arrivée.

ceux qui vraiment t'aident à te construire ; ils ont une lecture qui diffère. ça te rend multiple. un milliard de toi qui te disent tout autant.

je ris. écris-moi encore, je te lirai toujours toujours. en route, je me penche pour cueillir dans ton osier la clématite. faire tourner sa tige entre les doigts. il faut éviter de trop regarder ce monde blanc. quelque chose dans mon esprit se fait blanc.

la vérité, le cœur est double. bavard et silencieux. j'ai oublié les rues ici. si tu es là elles me semblent sécuritaires. rose, as-tu emporté avec toi un peu de lavande séchée

penser. je veux penser à autre chose. alors je parle de lavande. car c'est un souvenir avec toi, je peux le partager. ouvrir la porte d'un coin de paix et de banalité. éloigner la pensée de ces rues.