Début de soirée qui aurait dû être tranquile, Osvald, puisque tu venais de finir ta dernière livraison. T'avais bien callé les heures de dépôt de marchandise pour terminer tôt. Assez pour faire ce que les gens normaux faisaient de leur vie. Entre autres, les courses que tu n'avais pas fait depuis une éternité.

Tes réserves étaient plus vide que les terres volcaniques  en période de canicule. Pas que commander aux restos avoisinants te pose un problème, mais tu te trouvais souvent à regretter de ne pas au moins avoir de quoi grigonotter à portée de main. Alors avant de faire le trajet retour jusqu'à Halloween City, t'en avais profité pour t'arrêter à l'épicerie pour faire un semblant d'aprovisionnement.

L'endroit est plus bruyant qu'à l'accoutumée, mais tu n'en penses rien de spécial. T'es pas là pour bien longtemps de toute façon, et tu as plus attrapé le caddie par réflexe que par nécessité. Il n'y traîne que quelques snacks et graines dans le fond, quelques bouteilles d'alcool. Rien que tu n'aurais pas pu caser dans un panier.

Mais ton manque d'intérêt s'interrompt au croisement du rayon suivant. Quand les bruits de pas s'accélèrent. Quand ils raisonnent plus fort dans le commerce. Pas le temps de tourner la tête, le charriot est déjà trop proche du tiens. C'est le bruit de la collision qui te fait perdre l'équilibre. Sursaut que tu ne sais retenir, il y a ce truc avec les fracas de la sorte qui te font sauter au plafond.

Le cul au sol, main agripée à l'étagère à ta droite dont une bonne demi douzaine de sachets d'épices sont tombés avec toi, tu regardes la gamine responsable de l'accident virvoletter autours de toi. Il ne manquait plus que ça.  Une enfant bruyante. Bruyante, et en demande d'attention. Il n'y a pas grand-chose qui puis t'énerver plus que ça.

Et déjà, tu sens les nerfs qui te montent. Tu vas avoir du mal à te retenir de lui fouttre ton couteau sous la gorge, Oz, mais tu n'as pas le choix. C'est Neverland, et t'as déjà bien assez eu d'embrouille avec la police locale. Alastor ne viendrait probablement pas te chercher la prochaine fois. Alors tu ravales ta salive en t'appuyant sur les étallage pour te relever, essuie la poussière sur ton pentalon noir et remonte les manches de ta chemise. Garde ce couteau loin de toi. Tout du moins tant que les regards sont toujours braqués sur vous.

Regarder où je mets les pieds? Parles pour toi, gamine. Les miens ont au moins l'avantage d'être sur le sol.

L'air grave dans tes prunelles en dit assez long sur ton énervement que tu peine à contenir. C'est définitivement une gamine, mais pas assez pour que quelques mots un peu trop haut ne t'attirent des soucis. Et tu suspectes ne pas être le seul client gavé par son comportement.

Maintenant, si tu veux pas voir qui va être le grand perdant de cette histoire, petite, je te conseille de la fermer avant que t'y perdes une ou deux dents.

Elle parle, elle parle, et elle ne la ferme jamais. Insupportable petite chose, pile électrique qui semble ne jamais s'user dans ces putain de jouet pour enfant au son insupportable. Elle moque tes cheveux, saute sur ton caddie, et tu sens, doucement, la patience te quitter. T'essayes de garder la rage en toi. Pense à tes  problèmes avec la police de Neverland. Avec le maire aussi. T'essayes de faire le vide, mais elle enfonce son pied sur ton visage, et s'en est trop.

A peine a-t-elle eu le temps de finir de te narguer,  que ta main saisi sa cheville qui se détache de ta bouche. Elle ne sait pas à qui elle a à faire, la gamine, et t'as pas un compas moral pour te chuchoter qu'on ne fais pas de mal aux enfants. Cette idée t'as toujours semblé absurde, à Wonderland, où elle pourrait autant avoir vécu trois fois plus que toi. Tu la tire avec toi vers le sol, Oz, pour que ta seconde main puisse la saisir par les cheveux quand elle arrive à ton niveau. Traînes-la comme ça jusqu'à l'étalage, son visage entre deux paquets de farine. Tant pis pour tes problèmes avec Esteph.

Je pense pas que tu comprennes à qui tu t'adresses, petite.

La fureur brûle dans tes yeux, colère exaltée par ta tendance à la violence presque incitée par tes collègues depuis ces dernières années. Mais quand tu va pour fouiller les poches attachées à ta ceinture, ce n'est pas ton arme que tu empoigne, mais un sachet de poudre magique entrouvert qui se déverse sur ta paume.  La poudre pailletée sur tes doigts qui ne tarde à encercler le fin visage de la gamine, juste sous son nez où elle n'aurait, sûrement, d'autres choix que d'inspirer le fruit de ta production. Qu'elle le prenne bien ou mal, les chances étaient que ça la calmerait au moins assez pour qu'elle te laisse tranquille.

J'ai dit : la ferme.