CARACTÈRE

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Et dans la douceur, tu as tué.


Madeline n’est que le reflet d’un monde fou sur l’eau d’un lac souillé, une étrangeté qui aurait dû avoir lieu un jour mais qui est apparue une nuit. Elle ne vit pas Madeline, elle n’a jamais vécu même, car dans ses yeux vivent les démons. Dans l’infernale innocence qu’est la sienne, Madeline ne comprend pas le monde car le monde ne l’a jamais comprise.

Tantôt monstre tantôt ange, tantôt cruelle tantôt douce, Madeline n’a jamais été ni l’un ni l’autre. Elle ne se définit pas car toute définitions seraient funestes sur son visage blanc, si elle venait à être restreindre par des mots elle en mourrirait sans pousser le moindre cri. La folie lui a donné l’espoir, l’humanité lui a donné l’horreur et elle danse dans une lente valse que personne d’autre qu’elle ne peut entendre.

Ses pensées, ses idées, ses rêves n’émouvaient personne, ses désirs n’étaient que des froissements de tapis dans l’ombre de la grandeur des élus. Peut-être que c’était de là l’origine de ses invisibles tourments, de ses pleurs frénétiques, la sensation horrible de n’être jamais qu’un visage sans nom, une statique qui s’efface avec la tranquillité du lotus s’épanouissant. Alors, Madeline n’a plus voulu sourire.

On peut toujours acheter des rires aux espoirs, de la douleur à la peur. L’argent était un maître sans complaisance et sans ambivalence, un maître qui prenait autant qu’il donnait alors Madeline lui a donné ses sourires et son cœur dans l’idée simple qu’au moins, lui, il serait là -pour elle-. Alors, elle lui offre ses anges qu’elle cultive au bécher dans son petit jardin intime. Ironie divine, elle ne comprend pas l’argent et ne voit que dans ses vertus et son amassement éternel, des valeurs de bonheur et de félicité. Il n’est rien.

Tout existe pour être usé.

Voici qu’elle tremble et sombre dans ses violences, ses cultes de sang et de tripes à la gloire de son Dieu créé. Madeline ne tue pas par plaisir, elle tue par respect et conviction dans la foi fétiche. Elle tue car elle pense guider vers un monde meilleur, elle tue car elle pense soulager le monde d’un poids inutile, elle tue ses visages pour ne plus entendre ses mots qu’elle fuit encore et toujours sans jamais entendre le bruit de sa panique. Elle est le monstre qu’on cache, le monstre qu’on protège, le monstre qui ne sait pas être un monstre. Et tandis qu’elle prie, ses émotions qu’elle n’a jamais compris affluent et se logent dans sa gorge.

“Madeline, qui es tu ? Madeline as tu peur ?”

Aucun concept ne s’avachit dans son esprit, son monde est d’un blanc pur teinté du noir de ses tenèbres. Comment parler d’amour si l’acte d’aimer n’a jamais eu de mots dans sa conscience ? Comment parler d’haine quand son être ne connaît que le rejet éternel ? Comment parler de douleur quand le pilier de sa vie a été à jamais arraché de ses bras froids ? Madeline ne dit rien et dans sa tête baissée, elle voit les étoiles à même la terre ensemencée car sa violence ne cache dans son sein dans la plus douce des façons

Son petit cœur tout plein du ravissement amadoueur.
Elle tente de se faire aimer, elle tente de se nouer des liens, de perdre cette virginité dans ce mouvement de l’âme. Mais rien n’y fait, rien n’y convient. Ses mains tachées de sang et ses yeux vides font fuir tandis que ses paroles louent et prient un dieu qui n’existe pas. Et sans cesse, sans aucun répit, elle reprend les débris de ses amours pour les tendre envers et toujours.

Criant à s’étouffer, elle n’a jamais eu de voix pour commencer.

Mots froissés sur son lit de soie, sa poitrine se secouait du même sanglot. Maquillage plaqué sur ses joues, elle s’étouffait si magnifiquement. Les voix vrillaient et se moquaient d'elle, de ses hommes qui avait eu son corps, de ses sourires qu’elle imitait.

“Tu ne seras jamais elle”
“Marchandise gâtée”
“Pourquoi tu essaies ?”
“Caches toi”
“efface ton visage”
“Efface tes yeux”


Et elle ne pouvait pas parler. Tout lui faisait si mal dans cette pièce de lustres et d’or, dans ses habits plus chers que les pavés de son village natal. Madeline, non, Rachel n’existait plus.

Une pilule
“Hypocrite, tu le fais exprès ?”
Deux pilules
“A...tte… d...rs…”
trois pilules
“...e….s...s...h…”
quatre pilules
“....”
Cinq pilules
“viens à moi”


Et dans la tendresse de ses mots, elle se love contre cette figure froide qui a le nom de sœur, portant les mêmes vêtements avec la grâce des dieux. Son écharpe sur les yeux, elle partit, et plus rien n'eut jamais aucun sens.


+Née Héhua Mù dans un petit village perdu de la Chine continentale. Elle possède une soeur jumelle et vivent main dans la main dans la plus parfaite des précarité.
+Se révèle très tôt atteinte de schizophrénie, à l’âge de 3 ans. Les parents paniqués et perdus, tentent de la soigner à l’aide de rituels mais n’y parvenant pas ils abandonnent leurs deux filles.
+Inconsciente de la situation, Héhua est ravie de pouvoir passer plein de temps avec sa soeur, soeur qui se bat contre le monde pour les nourrir, les loger.
+Un jour, une multimillionnaire suédoise les adopte, touchée par l’horreur ordinaire de leurs vies. Début d’une nouvelle vie pour Héhua où sa maladie est enfin prise en charge. Elle est renommée Rachel Judith Wilander.
+Très attachée à sa sœur, elle ne se définit que par elle et la suit constamment dans son ombre. Elle aime tout le monde mais son profond décalage la rend totalement à part.
+L’argent est le seul moyen avec lequel les gens veulent être son ami, elle l’utilise à tort et à travers, se met souvent dans des situations compromettantes où elle se fait utiliser.
+Sa soeur s’éloigne de plus en plus, et prise de panique, elle se plonge dans la religion du spiritualisme pour oublier sa peur, pensant que prier lui rendra sa soeur.
+Sa soeur meurt, accident de voiture, absolument traumatisée, elle prend l’identité et l’essence de sa soeur, se maquillant, jouant les femmes fatales pour supprimer son propre visage.
+Ne prend plus ses médicaments, car elle est “Madeline” désormais, et Madeline n’est pas malade.
+Utilisée encore une fois par des hommes comme jolie poupée riche, elle sombre dans la paranoia et son innocence est manipulée encore une fois. Ces contacts physiques la dégoûtent au plus haut point, mais elle met toujours plus de maquillage et porte les robes de sa défunte soeur.
+Crise, et mort, elle s’intoxique de médicaments en pensant revoir sa sœur à chaque pilule prise.