Evidemment, Alec ne comptait pas en rester là. C'est étrange car... toi non plus, au final. Cela faisait plusieurs jours pourtant que tu ne laissais rien paraitre à son égard. Aucun regard, même pas un sourire. Toujours le dos droit devant l'entrée des chambres que tu gardes précieusement. Daisy pendue à ton cou entre deux clients. Aaah quelle bonne odeur. Et voir Alec suer et saigner pour rembourser sa dette colossale, quel bonheur.

Mais voilà qu'il t'approche en secret, qu'il te demande si vous pouviez vous retrouver à l'auberge. Vraiment Alec ? Impatient, va.
Tu lui réponds que non, ça sera chez toi. Le 7 arvil au soir, chez toi.

Et t'as tout préparé pour ce rendez-vous, esprit tordu, idées en tête. Tu sais pas comment ça va se passer et tu veux pas qu'Alec se croit tout permis. C'est d'ailleurs pour ça que t'ouvres la porte de ton appartement, parce que tu sais qu'en terrain neutre il prendrait l'ascendant.



Le jour J, tu l'entends toquer à la porte. Tu lui ouvres. Il est un peu en retard, mais bon... c'est Alec. Lui demander de respecter un horaire ou d'avoir des bonnes manières, c'est peut-être trop pour lui.
T'es habillé comme d'habitude, belle chemise, cravate, bretelles en cuir. Cheveux parfaitements plaqués sur le crâne, petit sourire en coin.

Rien d'anormal. Tu le fais entrer, t'as déjà mis la table. C'est propre chez toi, mais surtout très impersonnel. Murs blancs, aucune décoration. Aseptisé, pas chaleureux.

— « Bonsoir Alec. »

T'as le ton un peu froid, comme si t'étais pas content de le voir. En fait, c'est ton air naturel et il le sait. T'es toujours un peu dans la lune quand tu subis pas tes crises de colère.

— « J'espère que tu as faim, parce que c'est prêt. »

Tes yeux le fixent avec intensité, alors que tu lui montres la table dressée. Sourire carnassier alors que tu effleures sa clavicule du bout des doigts, remontes sous sa gorge pour lui faire lever le menton.

— « Tu t'es rasé. »

Tu roucoules, satisfait - pas très rassuré.
Mais sûr de toi, parce que ce que t'as mis dans son plat et dans son vin risque de le faire dormir suffisamment. Et tu t'occuperas de lui après. Oui, après.

Ah. C'est un sauvage.
Il croyait quoi, qu'il allait venir pour te souiller, comme ça ? Sans décor ? Sans commodités ? Il te dégoute, décidément t'as bien fait de piéger la nourriture. Tu lui feras payer sa perversité insolente.
Il se saisit de ta mâchoire, après t'avoir balancé un pique sur Daisy. Tu peux pas t'empêcher de répondre pour le blesser.

— « Elle était chez moi hier. Elle au moins ne s'est pas plainte de mon sens de l'hospitalité. Ce que tu peux être rustre. »

Tu te dégages et serres les dents.
Vexé.
Regard froid et tu fixes la table avec un air aussi déçu qu'agacé. Comment ça il a déjà mangé ? Depuis quand on vient à un rendez-vous le ventre plein ?
Tu comprends pas, non. Il se méfie de toi, c'est pas possible autrement.

— « Pardon ? » Que tu grondes, sévère.

Tu le chope par le col, ne faisant pas fi de ses provocations. T'as envie de tout foutre en l'air tellement ça t'énerve. T'as envie de le ficeler à une chaise pour lui faire avaler de force mais non... non. Ça ne serait en rien amusant.

— « Je vois.. »

Tu relâches ta prise, la mine accablée.

— « Je me suis démené pour préparer tout ça. Tu n'as aucun savoir vivre. »

Tu siffles, mauvais et le traines jusqu'à la chaise de la table. Tu le forces à s'assoir. Il mangera, tu vas t'en assurer il mangera.

— « Tu vas me faire le plaisir d'y gouter. »

Et tu prends place à côté de lui.

Tu as le sourire mauvais, alors que tu te satisfais de le savoir jaloux de Daisy. Tout ça c'est fait exprès. L'unique raison de pourquoi tu lui parles, souris autant - c'est que tu sais que ça le tend (que lui ne puisse pas faire pareil).

— « Daisy Charming... Quelle jolie appellation j'y réfléchirais. »

Clin d'oeil provocateur. A bon entendeur.
Ou comment dire ; jamais de la vie.
T'es pas à ce point ravagé pour épouser une prostituée. Tu te respectes un minimum quand même. Et si tu l'aurais bien sali de tes mains vicieuses, tu préfères garder le plaisir de voir son corps se trémousser sur d'autres. Tu préfères regarder.

Il a pas l'habitude qu'il dit...
Tu éteins ton sourire et t'assois à côté de lui, t'accoudes sur la table et l'observes d'un regard songeur. C'est vrai que c'est loin d'être le préféré (et pourtant que diable! Il est assurément le plus beau). Merde. Joues roses.

Il avance l'assiette vers toi.
Tu le toises.

— « J'ai la mienne. De quoi tu te méfies ? »

Tu serres tes doigts sur la fourchette, feins un sourire alors que tu détailles sa part en tentant de rester calme. Tu ne dois rien laisser paraître, et même si tu sais ce que t'as mis dedans. Si tu en manges, il est possible que tu tombes dans les vapes avant lui. Et si vous dormez tous les deux... Non.

Tu approches la fourchette de l'assiette.

— « Tu vois ? »

La glisses entre les pattes, l'enroules de celle-ci, la sauce glissant suintant dans une odeur délicieuse. Lentement, sans le quitter des yeux, tu la portes à tes lèvres.
Moment de suspens, tu la reposes finalement.

— « Toi d'abord. »

Sueur qui perle le long de la tempe.

La fourchette entre ses doigts s'anime de ses doigts fins, instrumentalisée par son petit sourire et sa méfiance légendaire. ça t'arrache une grimace Aslan, alors que tu t'apprêtes à lui donner raison.
Tu ne supportes pas l'air qu'il affiche, quand il dirige. Tu ne supportes pas Alec, en fait, point.

Tu tiques à ses appelations, restes de marbre malgré que ça gronde dans ton ventre. Tes doigts s'agripent nerveusement à la nappe et tu te mords la lèvre inférieur alors que les pointes du métal vient chatouiller tes babines.

Putain.
Piégé à ton propre jeu.

— « Tu fais chier. »

Murmure qui sonne comme un demi-aveu alors que la nourriture s'engouffre dans ta bouche. Tu mâches avec dégout et avales à contre-coeur. Tapes du poing brutalement sur la table et lui balances l'assiette à la figure dans un accès de colère.

— « Putain. »

Tu te lèves de la table, avances lentement dans la cuisine pour te prendre un verre d'eau. Tu bois, bois, bois encore et le claques sur l'évier. Tu te retournes vers lui, adossé au plan de travail. Tu le toises, vexé. Rouge de rage.

— « Tu es fier de toi ? »

Lentement ta vue se trouble, et tes jambes tremblent.
Rapidement tu t'écroules et perds connaissance. Merde.

Les rêves ne sont pas accessibles dans les limbes. C'est le noir complet alors que tu sens que ton corps tombe dans ses bras. Douce gourmandise à peine effleurée, quelle ironie !
Allongé sur le canapé tu reviens peu à peu à toi mais les sons sont distordus. T'entends du bruit au loin mais ça sonne comme une agression. Tu bats des cils, grimaces. Papillonnes les paupières, qui frémissent sous la vague de frisson qui te prend à la gorge.

— « Alec... » C'est presque gémis.

T'es encore à demi-conscients et quand tes yeux s'ouvrent quelques secondes plus tard t'es encore secoué. Ton esprit vif fait rapidement le lien et tu te recroquevilles sur le cuir du canapé, le fait couiner. Poignets liés, tu l'as mérité mais ça t'arrache un râle d'insatisfaction.

Et...
Alec est encore là ?
Est-il dans l'optique de se venger (encore) parce que t'as voulu le piéger (encore) ? Ou est-ce qu'il n'a nulle-part ou aller, rien à faire.

Tu tires sur tes mains pour essayer de te dégager avant d'abandonner.
Soupires et te redresses.

— « J'ai dormi combien de temps ? »

Pragmatique, tu veux savoir combien de temps le poison fait effet sur toi.
Pourquoi c'est la première chose à laquelle tu penses ?

— « T'es pas parti. T'aurais pu m'abandonner là. »

Sourire vicelard.
L'arrogance qui suinte par tous les pores.

— « T'avais trop envie de moi au final. »

Quarante-cinq minutes quand même.
C'est long. Il confesse ne rien t'avoir fait, ne pas avoir eu envie de partir. Il est donc resté sage à côté de toi pendant tout ce temps ? Soulagé en partie (d'avoir pu conserver ta digne intégrité) mais tu le toises avec dédain alors que tu fulmines en réalité contre ta propre bêtise. Quel gâchis !

— « Je vois. »

Que tu réponds, toujours très solennel. Tu gardes la face, rien que pour l'énerver. Ne lui offres que cruelle indifférence quand il s'attend peut-être à ce que tu craques de désir. Mais cette position t'incommode Aslan, et si le fait d'être chez toi assoit naturellement une sorte d'ascendant - le maitre de la situation ne peut généralement rien dominer, attaché sur son canapé. Foutaises, ça t'arrache un râle d'inconfort.

Alec ne se prive pas pour commencer son petit numéro et tu dois bien lui concéder ceci. Diable qu'il est désirable ; l'envie se lie d'amitié au dégout et tu frissonnes désormais face à ce dégueulis d'émotions.

— « Je ne gémis pas ton nom dans mon sommeil. »

Vexé un peu, d'être exposé aussi facilement.
Mais tu te laisses faire, le regard farouche du prédateur acculé.
Et face à sa dernière question tu veux lui cracher mais tu te retiens de tout commentaire. Glisses ton genou que tu relèves pour le caler entre ses cuisses. Regard sévère qui peut répondre à la place des mots, et lentement tu viens exciter la partie qui lentement se gonfle.

— « Toi. Désespérément. »

Sourire. Soupire.
Aaaah... Oui.

Ah putain, la façon dont il geins ton prénom. Tu peux plus le nier, il te fait de l'effet. Quand ses doigts glissent lentement du cou, sur ton torse, à ton pantalon. Tu te gonfles d'envie, te gorges d'excitation alors que ses désirs inasouvies sont aux commandes.

Baiser passionné, vous vous échangez vos lèvres dans une danse enflammé. Tu forces le passage de ta langue alors que tu rêves d'écraser son visage entre tes doigts, marquer ses pommettes de gifles douloureuses. Mais les mains liées restent sagement (frustrées) au dessus de la tête alors que tu le laisses diriger. A contre coeur - certes - mais son bassin tu l'accueilles d'un souffle effrené quand vos bouches se délient enfin.

— « Alec... Laisse-moi te faire mal. »

Ou plutôt;
Aveu monstrueux qui crie fais-moi mal !

Il déboutonne ta chemise et tu te crispes, contractes les muscles de tes bras, toujours prisonniers. Merde. Tu bombes le torse, une goutte de sueurs perlant du buste jusqu'au nombril. Ta peau tremble, a la chair de poule mais a encré des jolis dessins.

La constellation du gémeaux, parsemée de quelques fleurs, au dessus du pectoral gauche. Et les phases de la lune sur le flanc droit. Recouvres parfaitement les deux plus profondes morsures qui ont marqué le corps et l'esprit.

Tu t'en souviens encore.
D'un coup violent et insolent, tu presses ton entrejambe contre la sienne ; et réponds en serrant les dents.

— « Je te trouve bien présomptueux. Ne crois pas une seule seconde que j'ai fait ça pour te plaire. »

Regard lubrique qui vascille alors que tu laisses tomber ta tête en arrière sur l'accoudoir, cheveux humides. Tu passes ta langue sur ta lèvre et le toises d'un rictus acerbe.

— « Mais soit. Tu aimes ? Aboies pour me le signifier. Ouaf. »