Il n'est pas encore venu le temps de la raison - plutôt celui des raisonnements maladifs et étriqués, des vengeances puériles mais élaborées. Tu n'as pas oublié, Aslan, ces longs jours plongés dans le noir ou seule la folie t'accompagnait. Tu as cultivé la soif de la revanche, la créativité de la punition. Ton chien est allé trop loin, il a dépassé les bornes. Alors la nuit tu ne dors plus, blotti à ses côtés tu gardes les yeux grands ouverts pour te laisser aller à des pensées fantômes et des idées noires. Comment lui faire payer au mieux ?

En ne faisant rien.
Qu'il s'y attende constamment, et que rien ne vienne confirmer ses angoisses.
Qu'il vive ainsi dans la peur pendant des jours, dans l'appréhension de ta colère sans jamais réussir à la déclencher. Et quand enfin il se sentira apaisé, soumis aux preuves irréfutables de ta sincérité - c'est à cet instant précis que tu viendras le cueillir, et le traumatiser à jamais.


C'est le soir, Alec rentre de son nouveau travail n'est-ce pas ?
Bien sûr quand il t'a demandé de lui faire confiance tu n'as pas posé de questions. Tu as souri et répondu d'accord, tu t'es laissé prendre gentiment sur le canapé, puis sur le lit. Ainsi le malaise s'installe lentement quand ta bonne humeur se transforme en servilité, et quand tout ce qui te rend terrifiant s'est dissipé.

Tu l'accueilles d'une mine bienveillante, alors que tu tournes et tournes et tournes la pâte à crêpes dans le saladier. Répètes à tue tête.

— « Tu as passé une bonne journée, tu as passé une bonne journée ? »

Sifflotes alors que tu resserres le tablier autour de ta taille, lui montres la table déjà mise.

— « Je t'ai préparé ton plat préféré ! C'était pas trop dur ? »

Tu viens vers lui déposer un baiser sur sa joue.
Il n'y a rien de naturel, rien d'habituel. Que le jeu commence.  

Alec n'a pas l'air bien - tu penches la tête sur le côté quand il appuie brusquement sur tes épaules. Tes yeux trahissent une surprise (et c'est plutôt bien joué) alors que tu perds lentement ton sourire. Tu déglutis, et tu te dégages délicatement alors qu'il te hurle dessus. Venge-toi putain ! Tu cesses de tourner la pâte à crêpes, abasourdi par cette supplication désespérée.
Jubiles intérieurement Aslan, de le voir torturée comme ça. C'est exactement ce que tu voulais, cherchais en agissant de cette manière.

— « Mais Alec... »

Tu attrapes sa main dans la tienne.

— « J'ai changé d'avis. Je me suis rendu compte... » que je n'étais pas pressé. « que j'avais été un mauvais garçon. Que j'ai été corrompu par cette haine au quotidien, par ces mauvaises ondes. Regarde-moi maintenant ! »

Tu prends du recul pour qu'il te regarde. Tu portes davantage de couleurs, un petit tablier avec écrit "un mort par jour" et quelques fleurs brodées. Les cheveux plaqués vers l'arrière. Tu as l'air d'un saint, si bien que tu pourrais tromper le Diable lui-même.

— « Tu n'aimes pas le nouveau Aslan ? »

Sourire et tu tournes les talons pour rejoindre le coin cuisine, poses le saladier et éteint le four pour sortir un plat fumant. Tu l'invites à se mettre à table. Et après avoir déposé la marmite, tu l'ouvres pour embaumer la pièce de l'odeur. Tu fais un pas vers lui, t'étonnes de sa réaction alors que tu glisses tes doigts dans ses cheveux avec douceur.

— « Tu peux manger sereinement mon coeur, je n'ai mis aucun poison. »

Avant qu'il ne se méfie, tu lui coupes l'herbe sous le pied. Tu prends ton pied Aslan, dans cette mascarade bien ficelée.
Tu t'installes et commences à manger, avant de lever ta fourchette.

— « AH ! J'ai oublié de nourrir notre chienne aujourd'hui. »

T'aurais dû.
Tu sais feindre la tristesse Aslan, et c'est un air mélancolique et déçu que tu arbores, tel un chien battu devant son maitre en colère. Tu joues le pauvre compagnon effarouché, amer de n'avoir su combler celui qu'il aime. Tu sais tout faire Aslan, mais dans ce rôle en particulier tu es devenu excellent. Tu poses lentement tes couverts en le voyant grogner, étouffes un sanglot dans une déglutition.

— « Ça.. ça ne te plait pas tout ce que je t'ai cuisiné ? Pourquoi est-ce que tu es si désagréable avec moi ...? »

Tu secoues la tête quand il te demande si tu es obligé d'aller nourrir Lassie tout de suite. S'il avait observé il aurait vu que tu ne manges pas vraiment, ta fourchette ne va jamais complètement à tes lèvres et en mime le geste uniquement. Mais il est trop en alerte pour remarquer ce genre de détail, son esprit enclin à détester cette situation.

Il te propose de la tuer, où plutôt se convaincs de le faire. Tu te lèves brusquement en même temps que lui, t'interdisant de trahir tes véritables intentions maintenant. C'est un éclat d'inquiétude qui t'habite.

— « Non ! Laisse-là ! Elle ne t'a rien fait la pauvre. »

La pauvre.
Comme si tu le pensais réellement.
Tes yeux s'attardent sur le couteau qu'il tient fermement entre ses doigts.

— « Pose ça. Tu vas te faire mal. »

Rien à faire, Alec est buté et s'il continue à chercher la merde il va bien finir par tomber dessus plus vite que prévu, et gâcher ta mise en scène.
Ça t'enrage Aslan, et t'as du mal à lui dissimuler. Tes muscles se tendent, inspires expires. Merde.

Tu te précipites vers la porte de la cave pour faire barrage, ainsi gagner quelques secondes pour te calmer. Le voyant arriver, tu restes inflexible et sensible - les deux bras étirés.

— « Je le redirais pas, laisse-la ! »

A peine écarté de l'entrée, tu tombes au sol de façon dramatique (à croire que tu t'y es jeté tout seul) et te pinces la lèvre.
Le voir déverrouillé la cave, entrer.
Sourire qui s'étire quand tu l'entends dévaler les escaliers. Car oui, ce n'est un poison ni un somnifère que tu as rajouté dans le plat mais un paralysant.

Alors le corps dans une prison invisible, étalé sur le béton à l'arrivé fracassante (fracassé). Dans l'obscurité de la cave il peut lever les yeux vers la porte encore ouverte - seule source de lumière - et tel un ange tu apparais dans l'encadrement.
Debout et grand sourire.

Tu restes un moment à le fixer d'en haut, à simplement jubiler silencieux de ce retournement de situation. Tu l'avais préparé depuis des jours tu avais pris ton pied à feindre l'innocence, à faire semblant, à faire monter la tension ! Jusqu'à l'apothéose ! C'était parfaitement dosé, même pas prémédité - le timing d'Alec t'avait aidé, et tu l'en remercie pour cela. Si sa rage était prévisible, tu n'avais pas imaginé qu'il agirait de cette manière.
Quoi que l'évocation de la chienne n'était pas dénuée d'attentes de ta part.

Tu tapes dans tes mains en rythme pendant plusieurs secondes, applaudit le clou du spectacle (la mise en scène de l'introduction seulement) et ne réponds pas à sa question. Tu remontes tes manches, gardes son tablier et allumes la lumière de la cave par l'interrupteur qui se situe à gauche en haut des marches.
Puis les descends lentement pour le rejoindre.

S'il peut tourner lentement les yeux, il ne verra pas Lassie sur le lit. D'ailleurs celui-ci est vide, parfaitement vide. Les draps propres et tirés. L'odeur de renfermé subsiste, l'odeur de mort aussi. Comme si tu lisais dans ses pensées, tu lui rétorques d'une voix cruelle.

— « Elle n'est pas morte, si c'est ce que tu penses. J'ai fait de la place et je l'ai mise ailleurs. »

Tu t'accroupis au dessus de lui.

— « Je ne suis pas allé travailler aujourd'hui, je me suis amusé à construire moi-même ce que je t'avais demandé. »

Au sol jonchent encore des planches et quelques outils en vrac. De l'autre côté du lit vide et dans un coin est construite une grande niche. Sont taillées dans le bois les lettres A L E C.
Regard mauvais qui luit, tu lui caresses la joue.

— « Bienvenue dans ton nouveau chez toi mon coeur. »

Ce n'est que le juste retour de bâton.

— « Toi aussi, tu vas gouter au désespoir, je te l'avais promis. »

Tu souffles sur son nez après y avoir déposé un léger baiser. Grondes de plaisir.

— « Et je tiens toujours mes promesses. »

Tu te redresses et le saisis de ses jambes pour le tirer lentement vers la niche, lui fait taper le dos contre le béton au passage.

Tu le tires de toutes tes forces alors qu'il hurle de rage, te gausses de son désespoir. Inspires, expires. C'est parce que tu l'aimes autant que tu le hais que tu vas lui faire du mal à lui faire du bien. Le jettes a l'entrée de la niche et l'enjambes, puis t'assois au sol pour le placer sur toi. Son dos contre ton torse.

— « Respire, tout se passera bien je te le promets. Tu n'as pas besoin de le savoir pour l'instant. »

Tu glisses tes doigts sur sa poitrine, frottes au niveau de son cœur. Descends lancinant jusqu'à son bassin, entre ses jambes. Appuies fortement mais d'une certaine tendresse.

— « Tu me sens ? »

Tu remontes ta deuxième main à son visage pour lui lever le menton. Lui montre du doigt les lettres d'Alec en haut de la niche. C'est pour lui que tu l'as construite.
Tu te hisses et le laisses tomber lourdement sur le béton; à genoux contre le sol tu te penches au dessus de lui pour le couvrir de baisers.

— « Je t'aime je t'aime ... Mon chien d'amour je t'aime tellement. Aboies pour moi... »

Fronces les sourcils et te lèves doucement. Tu l'abandonnes et rentres dans la mini bâtisse pour en sortir des cordes et des chaînes. à nous deux penses tu quand tu enroules un pan de la corde à des crochets à l'intérieure. Tu ris à gorge déployée en le voyant inerte.

— « Poupée... de chiffon... »

Et tu lui passe le collier de piques autour du cou.

Tu déglutis Aslan, c'est dur de garder le contrôle quand la jouissance déforme tes traits, fait luire tes yeux écarquillés. Ce spectacle qu'il performe pour toi, tu l'as imaginé dans cette cave même, des jours plus tôt - en compagnie de votre chienne Lassie. C'est elle qui t'a murmuré l'idée de la niche, c'est sa condition qui t'a inspiré un pareil supplice.
Alec geins et sous tes doigts assassins sent monter la pression et le désir opportun. Tu roucoules, à l'aise et quand il cherche une justification à tant de violence, tant d'humiliation, tu hausses les épaules comme s'il n'en était rien.

— « Une des raisons, peut-être. »

Ça t'agace qu'il fasse semblant de ne pas comprendre, quand alors lui même te suppliait d'agir quelques minutes auparavant.
C'est ce que tu as fait, tu as agis. Tu t'abaisses au dessus de lui, remettant ses cheveux correctement. Effleurant les piques du collier du bout des doigts.

— « Je t'avais prévenu, et tu as quand même continué d'abuser. Tu as profité de moi et c'est à mon tour de m'amuser Alec. »

Tu te pinces l'arrête du nez.

— « J'ai des méthodes différentes, voilà tout. »

Etires un sourire énigmatique pour seule réponse à sa panique.

— « Qui sait. »

Tu le fais rouler délicatement pour le plaquer sur le ventre, agences avec précision ses bras le long du corps. Tu caresses le creux de son dos, dessines avec délicatesse des cercles et des carrés. Descends jusqu'à la courbe de ses fesses. Violemment, tu les assènes d'une claque sèche. Celle qui fait mal et qui laisse des traces sur la peau. Tu recommences plusieurs fois, juste retour de bâton de la dernière fois.

— « Quand tu pourras bouger de nouveau, tu seras solidement attaché à l'intérieur. Ne t'inquiète pas pour moi surtout, je ne te laisserai pas l'opportunité de me faire quoi que ce soit. »

Tu tires sur l'intérieur de ses coudes, et comme une poupée, tu le places à l'intérieur de la nique. Un poignet relié à un crochet grâce à une courte chaine, le deuxième exactement pareil de l'autre côté. Il est paisiblement installé et toujours à genoux face à lui, tu saisis son visage pour appuyer sur sa lèvre inférieure.

— « Je vais te briser Alec. Et tu sais quoi ? A la fin t'en redemanderas. »

Murmure chaud.

— « Parce que c'est ce qu'on est devenu n'est-ce pas ? Des monstres insatiables. »

Il semble réaliser ce qui t'a rendu dingue, réaliser ce qui a développé ton désir féroce de revanche. Alec est un diamant brut, et même sous les fessées il ne saurait s'abimer. Il se colore mais jamais ne s'effrite, il se gonfle mais jamais ne se brise. Sous les caresses endiablées et les déclarations d'amour tu enfonces tes ongles et y glisses tes vices. Eclates de rire quand il s'outre sur la fameuse niche, tu as du mal à contenir ton hilarité - surtout qu'elle est convulsive (et compulsive). Tu lui caresses le visage alors que tu harnaches son deuxième poignet. Quand il pourra bouger il sera tout de même condamné à rester assis à l'intérieur de la niche, car les chaines sont suffisamment courtes pour l'empêcher de se redresser.

— « Et toi tu es beau comme ça. »

Souffles à son oreille.

— « À ma merci. »

Quand il te provoque tu perds lentement ton sourire. C'est qu'il joue avec tes désirs, accentue ton délire. Tu ne caches pas ton excitation prononcée en cet instant et vient envahir de tes doigts l'antre de ses cuisses. Caresses par dessus son pantalon alors que tu progresses lentement tes lèvres humides le long de sa nuque. Te frottes aux piques de son collier et susurres d'un ton mielleux.

— « Tu es certain de vouloir me laisser essayer ? »

Serpent torride qui chauffe et refroidit, frustre alors que tu t'éloignes progressivement de lui.

— « Très bien alors, je m'en vais retrouver mon autre chienne. »

Ton regard brille de malveillance et tu t'extirpes de cette mini prison pour t'assoir sur le lit, croises les jambes pour le narguer. Qu'il ne puisse plus te dévorer.

— « Je vais dormir avec elle cette nuit. Elle qui prendra ta place dans le lit. Elle qui se blottira contre moi. »

Tu passes ta langue sur ta lèvre.

— « Et on verra qui aboiera le plus fort. »

Tu te lèves et tournes les talons.

— « Passe une douce nuit mon coeur. »

HAHAHAHAHA. Tu es pris d'un fou rire (encore) incontrôlé. Sur le lit tu te tiens les cotes alors que tu roules sur les draps. On dirait un enfant qui se bidonne après une blague en réalité pas si drôle que ça. Tu te redresses, t'essuies une larme au coin de l'oeil alors que ta voix tremble encore sous les soubresauts.

— « Tu me ... l'interdis ? C'est vraiment ce que j'ai entendu ? »

Inspires. Expires. Tu souffles d'une voix mielleuse.

— « Est-ce que tu es réellement en capacité de m'interdire quoi que ce soit ? »

Non, bien sûr que non. Alec le comprend lentement et si la rage l'emporte (les menaces de morts envers Lassie te font hausser un sourcil) il abandonne rapidement quand tu lui souhaites la bonne nuit. Arrivé au pied des escaliers, tu t'arrêtes quand il chouine, sa voix étouffée par le toit de la niche. Tu recules pour te mettre à portée de vue mais sans t'approcher pour autant.
Tu mentirais si tu affirmais ne rien ressentir en le voyant comme ça. Une petite voix qui te gratte l'arrière du crâne, qui rend ton souffle lourd à respirer. Tu veux le rejoindre, l'aimer, le chérir, le baiser mais aussi le détruire, l'enfermer, le frapper, le haïr.

D'une voix calme et posée tu réponds.

— « Non. »

Et grimpes rapidement les escaliers. Etouffant les larmes de frustration qui te montent aux yeux, tu te racles la gorge et dès que tu ouvres la porte tu chantes.

— « Laaaassiiiiie. »


Tu l'as laissé là toute la nuit sans redescendre, plongé dans le noir. Alec pouvait entendre parfois le mur derrière lui grincer et gratter. Rien de plus, car la pièce est insonorisée et même toi là haut tu ne pouvais soupçonner ce qu'il se passait en bas.
Bien que tu en avais eu une petite idée.

Le soleil se lève et tu prends ta douche, te brosses les dents. Tu t'habilles et décides de retourner voir Alec. L'effet du paralysant a du se dissiper, mais tu glisses un flacon dans la poche de ton pantalon au cas où tu en aurais de nouveau besoin.
Tu ouvres la porte de la cave et allumes la lumière. Tout frais tout beau tu approches de la niche d'une démarche guillerette.

— « Comment va mon chien préféré ? »

Tu portes une main à tes lèvres d'un air faussement surpris.

— « Ah mince ! Tu ne vas pas pouvoir aller travailler aujourd'hui.... Quel dommage. »