Valet de cœur.

Petit homme coupeur de tête.

D'une fidélité sans faille à la Reine. Comme toute sa clique, l'allégeance dans le crâne avant même la naissance. Aucun choix, aucun libre arbitre et idiots sont ceux qui croient à ce passé factice.

Arrogance mal placée de celui qui doute de son passé vécu. Qui doute doute doute insidieusement d'avoir déjà été libre. Mais c'est trop dur, trop dur de se confronter soi-même.

Regarder les autres se perdre et douter, ça c'est un passe-temps moins douloureux. Et eux, eux ils hésitent et se perdent. Jabberwocky brûle la salle de bal et le valet se demande, au détour de ses cycles, s'il n'a rien d'autre à faire que couper des têtes.

Les Dark Shadows sont partis du palais quelques temps (flous) plus tôt et Balthazar déambule, un joint de belle de nuit aux lèvres.

Le chapeau du valet au coin d'un couloir, sa démarche sérieuse et son imbuvable regard font grimacer le chien de la Reine.

Sourire défoncé.

- Knaaaave ! Quelle surprise !

(mauvaise mais on s'ennuie si vite ici)

- Tu reviens de l'exécution des derniers envahisseurs du palais ? À moins que vous n'en ayez capturé aucun ...

Sourire moqueur.

Oh, il est en colère.

Ça se voit à des kilomètres et Balth en raffole. Autant qu'il le déteste. Knave a trop souvent posé ses doigts sur sa nuque, ta tête a trop souvent roulé à ses pieds. Et pas qu'elle. Il se rappelle encore des balafres, des entailles immenses et béantes.

Il se rappelle qu'ils ont essayé de le dompter mais que jamais il n'a ployé l'échine. Collier, exécutions, torture. Le chien fou reste un chien fou.

Pour votre plus grand déplaisir.

Mais il se rappelle aussi de Romeo, tant et tant tué, assassiné par ce pouvoir. Et malgré le chaos laissé par le roi déchu, Balthazar ne pardonne pas.

Sourire narquois, Balthazar arrogant et défoncé.

- Des menaces, des menaces ... fut un temps, tu n'aurais pas hésité une seule seconde à me décapiter sans sommation.

C'est facile après tout, les immortels finissent irrémédiablement par revenir, accrochés à ce monde comme des parasites, mourant avec lui, déchirés à jamais.

Longue taffe de belle de nuit, fumée dans les poumons, chaos dans les yeux.

- Tu te ramollis Valetaille.

Elles sont paradoxalement très belles ces lames qui entaillent les paumes du Valet. Balthazar les a toujours trouvées fascinantes, outils de mort d'une précision absolue.

Et pourtant, elles se retournent si vite contre toi. Elles font couler ton sang, rouge rouge rouge comme celui que tu fais gicler chaque jour de ton existence. Tu n'as d'autre but que cela. Faire saigner.

- Allons Knave, je ne vais pas t'expliquer une énième fois à quel point j'exècre mon existence entre ses murs et à quel point ma seule exutoire est votre mort prochaine. De ma main de préférence.

Sourire plein de dents. Acérées, avides d'un jour arracher ta jugulaire et te faire payer toutes ces morts.

- Mon existence me dépite mais la tienne, Knave, est risible.

Grondement arrogant alors qu'il s'avance vers toi et te domine. Il y a des fêlures dans ton scénario, des doutes qui rongent et des lames émoussées.

- Tes lames ne m'offrent rien. Elles ne font plus mal à force. On croirait presque que tu ne te satisfais plus de leur tranchant.

Oh oui, doute Knave, doute.
Laisse le s'infiltrer en toi et te changer, écarter les pans de ton être. Pleure ta pauvre vie. Immortelle.

Il voit tes poings se serrer et le sang couler lentement de tes paumes entaillées. Il le voit et le savoure. Porte à ses lèvres la fumée de belle de nuit, aspire lentement. Il rit doucement. Moqueur arrogant.

Son collier luit au soleil, preuve implacable de sa captivité. Et pourtant, c'est lui qui te méprise et toi qui s'énerve en vain.

Sourire soudain tordu, regard soudain brûlant de rage.

- Oh mais Knave, tu m'as déjà tué mille et une fois .. et ça n'a pas marché.

L'éternité se répète. Certaines boucles parfois varient. Mais celle-là, celle de la têe du Bandersnatch qui tombe et quand elle se relève, elle n'est pas plus soumise qu'avant. Cette boucle est sans fin.

Balthazar se penche, pour être à ta hauteur. Il sait que tu détestes ça, être petit. C'est irritant à la fin, d'être toisé par tout le monde, même le clébard de la reine.

- Ah tu t'en fiches ? C'est toi pourtant qui a vanté les mérites de ces lames, qui m'offrent milles existences. Mais tu t'en fiches ... soit.

Sourire, se relève et marche, insolent au possible. Ses yeux aux pupilles éclatées par la drogue paraissent luire de malice. La colère poison, la colère serpent. Il est mauvais et insupportable. Sa place, sa place, elle est dans la grande salle avec la tête de Juliette dans une main et celle du Jabberwocky dans l'autre.

Ça arrivera, tout à sa haine, il en est persuadé.

- Si je ne te connaissais pas aussi bien, je croirais presque que celui qui n'est pas sûr de sa place ici, c'est toi. C'est si lassant d'être le bourreau d'une folle à lier ?

Le rouge te va bien. Il viendrait presque te colorer les oreilles comme les enfants en colère. Ceux qui pignent, qui font des caprices quand ils n'ont pas ce qu'il veut.

Tu aimerais qu'il soit un bon chien devant toi, un chien battu apeuré et brisé. Et toi, arrogant, tu t'arrogerais le mérite de son dressage.

Jamais. Pas même dans tes rêves cela n'arrivera.
Enfant gâté, pauvre idiot réalise un peu tard que parfois, on lui résiste.

Oh c'est frustrant. Hein ?

Ricanement.

- Je suis pourtant arrivé bien avant toi tu sais. Avant cette lubie de guerre fratricide.

Il est né libre et toi, ton allégeance fabriquée, on te l'a collé dans la tête, toi et tous les autres. Ricanement méprisant.

Puis éclat de rire. Magistral, tonitruant, méprisant.

- Tu as donc à ce point besoin des autres pour te sentir exister Valet. Tu me fais pitié.

Tuer pour tuer n'a aucun sens.
Balthazar ne comprend pas l'exécution, Balthazar vit pour le combat et la vengeance. Tes doigts lames sont beaux mais tellement ... pitoyables quand c'est toi qui les manie.

Le sang que tu tentes vainement d'essuyer te colle à la peau. À la paume. Tes lames émoussées ne blessent plus que toi et Balthazar, chien, se rit de tes doutes, se rit de ta colère.

À tes bravades, à tes grondements, Balthazar ne rétorque qu'un sourire arrogant. Parce qu'il te méprise. Il méprise tes lames, il méprise ta manière de tuer et tout ce que tu représentes. La mort au royaume de cœur, c'est toi. Pitoyable.

Il baille effrontément, s'étire et hoche vaguement la tête.

- Oui, tue-moi, comme la fois d'avant et celle d'encore avant. Tes menaces ne valent rien Knave, tout comme tes lames.

Les mains dans les poches, le corps vaguement lourd, Balthazar a envie de dormir. Knave ne l'amuse plus, ses colères enfantines sont prévisibles. Il hausse les épaules.

- J'n'ai pas besoin de toi pour perdre la tête. Oublie pas les pansements sur tes mains gamin, ça serait dommage que ça s'infecte.

Ricane et se détourne. Matou défoncé s'est bien amusé.
Matou va se vautrer au soleil pendant que tu cracheras ton seum.

Seul.