Tu n'avais eu besoin de quelques jours pour faire s'estomper les bleus, ainsi retrouver ton visage droit et lisse, ton port altier. Tu fais comme si de rien n'était Aslan, te pavanant toujours comme un prince précieux au moulin rouge.
Pendant la pause, c'est au bras de deux charmantes jeunes filles que tu le vois passer, un sourcil haussé et le regard équivoque. Tu ressers ta prise sur l'épaule de celle à ta droite, dépose ta tête sur l'épaule de celle à gauche et mimes un rire cristallin.

Alec disparait de ton champ de vision - et tu ne sais pas si tu en es satisfait ou si ça t'enrage. L'obsession toujours tatouée sous tes paupières ; tu ne vois que lui quand tu fermes les yeux. Et tu n'aimes pas trop, quand tes pensées sont polluées Aslan. Ça te rend malade, instable.
Prêt à tout pour reprendre le contrôle de ton encéphale - qui se noie peu à peu sous le flot noirâtre des idées malsaines et vengeresses.
Tu lui feras payer pour l'humiliation qu'il t'a imposé ; le double de ce qu'il t'a fait subir voir le triple car voyez-vous Aslan est rancunier.

Tout est question de patience et de stratégie.
Puissant sédatif dans le verre le moment où il a le dos tourné. Attend qu'il s'échoue sur le canapé du moulin, toujours à roupiller le soir même. Si bien que Mère Grand demande à ce qu'on le dégage de là s'il n'y a aucun moyen de le réveiller.

Tu te proposes, main sur le coeur (et idée en tête) de le porter jusqu'à sa chambre.
Le traines presque par le poignet une fois dans les escaliers car tu n'as vraiment aucune force physique. Tu connais sa piaule, tu l'as bien observé pendant des jours (et nuits) et tu ouvres la porte d'un coup de pied pour l'amener sur son lit, l'étendre - un peu essoufflé.

Tu essuie ta sueur et te mets en oeuvre.
L'attaches solidement poings et pieds liés au baldaquin. T'assures de verrouiller les issues pour que personne ne vienne te déranger. Tire les rideaux avec lenteur.
Le jeu du stalker commence, alors que tu tires une chaise pour t'asseoir à côté du lit. Poses ton menton sur tes doigts entremêlés, le regard mort, l'expression vide, le visage sombre.

Toujours innocent, Aslan est le Prince un peu trop charmant.
Et quand Alec ouvre les yeux après plus d'une heure à le fixer sans bouger, sans ciller, le sourire s'étire lentement tant les traits sont engourdis.

— « Bonsoir Alec. Je sais que tu ne t'abaisseras pas à crier. »

Ce n'est pas tant une menace, car tu sais qu'il a trop d'ego pour attendre de l'aide de qui que ce soit.

— « J'espère que tu passes une bonne soirée. »

Parce qu'avant tout tu es poli et prévenant.

Tu l'observes se réveiller en douceur, penches la tête sur le côté lorsqu'il te questionne.
Fais le malin, Alec. Fais le malin. Il n'arrive pas à te faire perdre ton petit sourire en coin. Tu es confiant Aslan, certain de ce que tu fais et impatient de ce que tu vas (lui) faire.
Tu restes calme, contemplatif. Plisses les yeux lorsqu'il se débat, avant de laisser ta tête basculer vers l'arrière, les bras écartés avachis sur ta chaise. Tu glousses avant de rire à gorge déployée, contenant tes éclats pour ne pas faire trop de bruit, bien que les chambres soient isolées. Tu te pinces la lèvre inférieure et remets tes cheveux vers l'arrière.

— « Hahaha... Aaaah. Alec. Tu es trop bête. Vraiment, supporter de me trouver dans la même pièce que toi est une épreuve en elle-même. Tu crois vraiment que je me toucherai sur toi ? »

Tu te remets correctement, l'hilarité s'évaporant dans une mine plus sombre. Tu avances le visage pour te pencher au dessus de lui.

— « Qui te dit que je ne suis pas un détraqué ? »

Non, c'est normal Aslan. Qui pourrait soupçonner le Prince ? Et puis Alec n'a rien de la princesse en danger, il n'est que le vil serpent que tu dois combattre - pour retrouver prospérité et sérénité dans le royaume.

— « Tu es un problème. »

Inspires. Expires. Merde.

— « Que je vais régler. »

A ses mots, tu détaches lentement le poignard de ta ceinture. Celui qui a remplacé l'épée toute la journée. Car tu prépares ton coup depuis plusieurs jours déjà - attendais le bon moment pour agir, le soir idéal pour le punir.
Tu soulèves lentement son haut sans t'attarder sur la vue. Pointe le bout de la lame sans percer la peau. Sadique ? A peine. Méthodique ? Certainement.

— « Mais je te laisse une chance. Excuse-toi, vermine, et j'en reste là. »

Sa provocation n'a d'égal que son arrogance suintante de perdant. Cela ne te fait plus aucun effet, si ce n'est celui de te conforter dans tes idées malsaines.
Tu la discernes, la peur qui luit au fond de ses yeux insatisfaits - nourrit ton appétit insatiable. Tu n'en resteras pas là, et tu avais même prévu de le faire quand même, avec ou sans ses excuses.

Aslan qu'il supplie presque à tes oreilles et tu hausses les sourcils en souriant, chantonnes doucement pour couvrir le bruit ignoble qui sort de sa bouche. La menace fuse, c'est sa dernière arme pour contrer la panique qui s'installe et tu avances tes doigts pour lui tapoter la joue. Comme un enfant pas sage, petites gifles sans douleur pour asseoir ta supériorité, achever de l'humilier.

— « Tu vas me quoi ? J'ai mal entendu. »

Appuies sur la lame en fronçant les sourcils.
Tu commences ton oeuvre, le maintient d'une main ferme sur son ventre pendant que tu traces grossièrement un A.
Lui proposes le choix parce que tu es courtois :

— « Aaah. J'ai du mal. Tu as la peau dure comme de la pierre. Très bien, je pars sur... A comme A L E C. Ou A comme ... »

Les yeux brillent mais sans aucun sourire pour te porter.
Tu ne joues plus Aslan, ou presque plus.
Tu actives ton pouvoir pour le rendre encore plus confus, même si tu doutes qu'il puisse être efficace vu la situation. Tu as décidé de sacrifier ta pureté pour le plus grand bien - pour lui faire comprendre que ses péchés sont vains, en plus de l'avoir condamné à ce triste sort.

— « J'ai toujours exécré les chieurs dans ton genre. Ceux qui se croient tout permis parce qu'ils ont une grande gueule. »

Le maitre de la situation c'est toi.
Le Roi du Silence.

Tu n'aurais pas imaginé que tu y prendrais autant de plaisir, à le sentir se débattre sous tes mains, à sa rage dans ses yeux qui s'allume et s'éteint au rythme du désespoir. C'est du coup un peu honteux dans ta tête d'aimer le faire souffrir - toi qui vit constamment sous le prisme de l'indifférence froide ou du désir instinctif, mu par tes pulsions comme seule lumière dans ce tunnel sombre.

Alec se tort dans tous les sens, se mord pour s'empêcher de crier et malgré les menaces tu sais qu'il n'en fera rien.
Car tu le tueras ce soir, s'il faut.
Tu éteindras définitivement toute source de gêne - pourquoi t'encombrer d'un malfrat de plus dans ce monde quand tu possèdes le pouvoir de l'éliminer ?
Ne penses pas aux possibles conséquences, Aslan, l'art de scarifier la peau est trop prenant.
Car tu es minutieux, tu veux faire ça bien. Que le lettrage soit parfait quand tu étires le S...

   A
S
      L
 A
          N

Ça prend du temps mais tu réussis à tout tracer rapidement. Le sang coule des plaies, sillonne les muscles tendus jusqu'aux draps pour les tâcher. Tu souffles, épuisé d'avoir du te concentrer sur ton oeuvre. Tu prends du recul pour admirer, passes un doigt à tes lèvres.

— « Tu m'as dans la peau maintenant. Qu'est-ce que ça te fait, Alec ? »

Tu t'agenouilles et croises les bras sur le lit, y déposes ta tête et lui sourit d'une fausse bienveillance, alors que tu tends le doigts pour lui frôler les côtes encore sensibles, lui arracher un soubresaut qui pourrait réveiller la douleur anesthésiée par l'adrénaline.

— « Je te hais tellement. J'aimerai que tu meurs. Supplie-moi de t'achever, lavette. »

On a les yeux tristes et le corps du christ.

Va te faire foutre. Sans façon, merci.
Les yeux s'écarquillent dans un demi sourire alors que le regard s'éclaire soudainement. Il a donc encore de la force pour parler, cet idiot ? Tu es sincèrement impressionné par sa ténacité, sa rage inébranlable comme seul rempart face à l'adversité. Alec ne veut pas sombrer et il a raison, tu l'admires pour ça.
Tu aurais peut-être fini par plier, toi, sous la douleur. Tu aurais peut-être gueuler comme un couard pour ne pas qu'il t'égratigne. Car à défaut d'être fourbe, tu es aussi lâche qu'astucieux.
Tu trouves toujours un moyen pour t'en sortir, pour survivre à ce monde de fous quand Alec fonce tête baissée pour ne jamais abandonner. C'est en cela que tu le méprises.

Les idiots courageux et entêtés ont la plus belle place, l'honneur d'être respecté !
Contrairement aux malins qui veulent juste sauver leur peau, même si pour cela on peut les qualifier parfois de génies insoupçonnés.

— « Arrête de résister tu vas finir par me vomir dessus, gros dégueulasse. »

Tu le toises avec dégout, fronce le nez dans une mimique désobligeante lorsqu'il se permet de te descendre. Rire sordide entre tes lèvres en guise de seule réponse.
Tu ramasses ton couteau et l'essuies sur les draps pour faire briller la lame, t'admires dedans pendant quelques secondes avant de le déposer délicatement à côté de toi.

— « Tu n'as toujours pas compris ? Tu ne sortiras pas de cette chambre vivant. Je prends juste mon temps. »

Allez, chiale.
Allez, prends peur.

Tu ne le tueras évidemment pas Aslan, non pas parce que tu n'en es pas capable mais surtout parce que tu as peur - peur de perdre cette obsession qui te brule les veines.
C'est un dilemme qui te torture insidieusement. Tu veux le faire disparaitre et en même temps, es-tu capable de faire sans ? Merde.

— « Alors brisons quelques os. »

Haha, jolie celle-là !
Mais tu ris pas.

Abats ton poing sur son bras. T'attendais un craque mais rien ne se passe. T'as pas de force Aslan, arrête de t'acharner !

— « Ah. »

Les joues se teintent de rouge, alors que tu es penché au dessus de son visage (pour atteindre ses bras attachés) peut-être par honte. Tu attrapes alors le couteau, le tient à la renverse et calibres avec minutie l'angle pour viser l'os avec le manche.
Crack.
Cette fois c'est bon. Merde.

— « Tu craqueras avant le matin. »

T'as complètement perdu pied, Majesté. Qu'une âme vienne t'arrêter.

Tu tressailles quand il étouffe son cri de douleur, mécontent de faire aussi peu d'effet. Ou du moins, insatisfait de ne pas réussir à le faire céder. Ça t'enrage dans ton esprit étriqué que tout ne se passe pas comme tu l'avais espéré. Les émotions contraires sont une bouilli nefaste et lentement tu chavires, perd pied quand l'océan te submerge et que tu quittes la terre ferme.
Tu fermes les yeux Aslan, l'écoutes geindre faiblement, attends patiemment - que la douleur se diffuse dans tout son corps.

Curieux, tu demandes :

— « Tu n'as pas peur de la mort ? »

S'il est libéré de cette crainte, ce n'est plus de la jalousie que tu as envers lui - mais une admiration féroce qui se traduit par une envie malsaine de le détruire petit à petit.
Comme les briques d'une maison qu'en enlève une à une. La fondation risquerait de s'écrouler à chaque instant.
Tu veux étouffer cette liberté. La découper en petits morceaux. Tu ne sais plus ce que tu fais, quel était le plan déjà ? Merde.

A son ultime provocation, on dirait qu'il en redemande encore. Tu siffles entre tes dents, hésitant à lui casser l'autre bras de la même manière. Mais tu préfères pour l'instant te taire.
Tu t'écartes pour récupérer un semblant de respiration normale. Tu transpires un peu et tu t'essuies le front d'un revers de la manche. Le regard dilaté cherche un point d'encrage...
Le corps étendu d'Alec à ta merci - jusqu'à où tu vas Aslan ? Est-ce qu'il serait capable de tenir toute la nuit ?

Tu lèves ta jambe, dos droit, et le frappes violemment dans l'abdomen.
Puis te rassois sur ta chaise.
L'observes de nouveau avec intensité, le menton sur tes doigts entremêlés.

— « Ce dont tu as besoin ce n'est pas d'être éduqué mais d'être dressé. »

Les doigts se délient et viennent caresser la blessure scarifiée, y dessine les lettres du bout de l'index.

— « T'es mon chien maintenant. Aboie pour moi. »

Ça y est, le sang sort enfin par la bouche. Tu l'observes couler le long de sa mâchoire, mélangé à de la salive , continuant de tracer du bout des doigts ton prénom dans sa chair. Tu le sens trembler, et appuies de temps en temps sur la plaie pour le faire se cambrer.
Sourire doux, tu es charmant Aslan.

Sale chienne.
Le rictus s'évanouit au profit d'une grimace disgracieuse. Pourquoi pourquoi pourquoi refuse t-il de t'obéir ? Ça te rend malade Aslan alors tu te prends la tête dans tes mains, baisses les yeux sur le sol pour réfléchir. Ça ne se passe pas comme prévu - tu vas devoir le tuer pour qu'il comprenne. Mais une fois mort il ne pourra pas te dire "tu avais raison Aslan". Alors tu ne sais plus quoi faire. Tu ne sais pas où ni comment t'arrêter.

A quel moment ?
A quel endroit ?

— « Non. Pas comme ça. »

Tu te lèves brusquement, attrapes le couteau entre tes doigts moites et vient plaquer la lame sur sa gorge. Tu fais pression dessus et le fixes d'un regard écarquillé.
Troublant.

— « C'est pas comme ça qu'on aboie. »

Tu appuies un peu plus, pour lui couper la respiration. Ça tranche légèrement sa peau, l'irrite. Il pourra pas se gratter, ça va le démanger c'est parfait.
Tu murmures à son souffle.

— « Répète après moi. »

C'est intenable. Il t'obsède.

— « Ouaf. »

Merde.

C'est terminé. Il va mourir sous ta lame si tu ne t'arrêtes pas maintenant. Tu vois qu'il n'a plus d'oxygène, que la pression que tu appliques sur sa gorge empêche l'air d'atteindre ses poumons. Il va d'abord perdre connaissance puis quand le sang aura fini son grand tour il...
Arrête Aslan. Il a compris, Alec a compris la leçon.
Mais c'est si satisfaisant.
Arrête Aslan.

D'accord. Merde.
Tu recules, toi même haletant. Tu éloignes le couteau de sa gorge et le reposes délicatement sur les draps. Avec une petite serviette posée dans un coin de la pièce, tu viens essuyer la mousse qui bulle un peu au niveau de ses lèvres, en profite pour nettoyer le sang séché sur sa mâchoire carrée. Tu t'attardes un peu sur son visage faible et éteint, le fixes pendant de longues minutes sans bouger.

Il est beau.
Il est dégueulasse, ce sale chien.
Tu fais quoi maintenant, de cet animal désobéissant ?

— « Alec. Je t'épargne. Tu vas vivre. » Pour me servir.

Te penches au dessus de lui.

— « Uniquement parce que je l'ai décidé. Rappelle toi de cette soirée où tu étais à ma merci. Souviens t-en la prochaine fois que tu as dans l'idée de poser la main sur moi. »

Tu sors un petit flacon d'onguent de ta poche. Y pénètre deux doigts pour en récolter la mixture pour l'étaler sur sa gorge, ainsi faire cicatriser rapidement la vilaine blessure.
Tu hésites Aslan, sur ton prénom au niveau de ses cotes. Au delà de cette humiliation, c'est une preuve que tu n'es pas sûre d'atténuer avec ton don.
Alec est-il du genre à sacrifier sa fierté pour tout aller balancer à Mère Grand ?
Non. Tu es innocent Aslan - aussi pur que le prince charmant. Cet idiot serait bien capable de s'être fait ça tout seul ; vu comment il est obsédé par ta personne.

— « Tu vas te tenir tranquille à partir de maintenant. »

Lui souris avec douceur et bienveillance.
Horreur, arrogance et défiance.

Tu t'avances pour lui détacher une cheville (celle de droite) et un poignet (celui de gauche).

— « Démerde toi pour te libérer quand tu auras la force. »

Rajoutes en sifflotant.

— « Mon coeur. »

Haut-le-coeur;
Alors que tu ramasses ton épée.