Toujours la même histoire.
Toujours la même routine.
Et toi Lucrecia… tu restes immuablement la même.
Chaque journée que tu passes ici ressemble à celle d’hier. Si bien que tu as l’impression de tourner en rond. Le hamster bloqué dans sa roue ; condamné à tourner encore et encore. Toi tu es convaincue que tu avances dans la bonne direction… mais est-ce vraiment le cas ? Comment le savoir alors que tu ne dévies jamais ta trajectoire ? Comment savoir si ce qu’on fait est bon quand on ne connait pas autre chose ?
Tu ne sais pas.
Tu ne veux pas y penser.
Réfléchir c’est trop douloureux pour toi.
Même ça tu n’en es pas capable… tu te détestes pour pleins de raison, celle-ci n’en était qu’une parmi la pléthore d’autres. Ton corps bouge machinalement, manipulé par l’habitude, par la complaisance. Tu remplis ton rôle Lucrecia. Celle de la petite prostituée qui offre son corps pour quelques pécules, espérant entrevoir un avenir. Un futur que tu regardes par la serrure d’une porte verrouillée. Et tu sais quel est le plus drôle dans tout cela ? La clé de cette porte… c’est toi qui la détiens.
Mais le fait de raisonner te provoquant cette vive algie, tu oublies ton potentiel, ton avenir, tes possibilités. Tu restes enfermée dans ce cocon qui t’apparaît douillet sans essayer d’entrevoir les autres options qui pourraient s’offrir à toi.
Et il est là lui, encore lui, encore là.
Il vient te voir une fois de plus.
Pour une fois, cela ne te déplait pas ; parmi l’humanité que tu hais, il y en est un que tu détestes moins que les autres. Alors quand il vient te rendre visite, tu lui offres ce qui se rapproche le plus d’un sourire. Pour toi ce n’est qu’une grimace, pour les autres, ce n’est ni plus ni moins qu’un sourire d’une jeune femme au visage angélique à l'expression furieuse. Beauté furieuse, sulfureuse.
Tu le salues comme s’il te dérange, alors que pour une fois, tu es contente de le voir, brisant la monotonie de ta journée :
─
Encore-là toi. Qu’est-ce que tu veux cette fois ? La même chose que d’habitude ?Tu ne lui diras pas Lucrecia.
Tu ne veux pas lui dire que tu es contente de le voir.
Tu ne le penses peut-être même pas.
Mais tu mens tellement souvent que tu ne fais même plus la différence entre mentir aux autres et à toi-même.