Et si, et si, et si... On referait le monde avec de telles formulations, Keith et tu le sais. Face aux regrets, on ne peut que se les poser, ces questions idiotes Keith. On essaye de réécrire l'histoire, d'y trouver de nouvelles fins. Mais ce qui est fait est fait et elle a fini par apprendre, Romane, qu'on souffre plus de ses réflexions que de son ignorance. Elle n'a plus la force de se dresser de nouveaux scénarios, Romane. Toi si, visiblement. C'est quelque chose qu'elle t'envie, qu'elle admire aussi. Parce qu'elle voit dans ce désir de questionnement une forme de courage qu'elle n'a pas encore. À préférer fuir et passer des couches de vernis sur ses faiblesses, Romane. À préféré travestir ses propres manques en pseudo-sagesse pour se faire plus grande. Pourtant, tu la surestimes, Keith. Parce que de vous deux, tu es probablement le plus sage et le plus fort, tu sais ?

Et tu dis que ça fait du bien de parler. Elle se sent roussir délicieusement. Une forme de fierté face au fait que tu aies de toi-même accepté d'ouvrir la porte. Elle se redresse, Romane, stop le massage pour venir se dresser sur ses genoux, tendre ses mains, ses propres mains, vers tes joues. Pour capter ton regard et ton visage, Keith, car cette ouverture ne doit en aucun cas être unique.

« Je ne te forcerai pas à me parler, Keith. Mais maintenant que tu sais à quel point ça fait du bien, je ne veux plus que tu hésites. J'écouterai, d'accord ? »

Proximité nouvelle. Jusqu'alors, ça avait toujours été tes mains sur elle, jamais la sienne sur toi. Pourtant, elle ose dans les gestes tendre caresser du bout du pouce ta peau. Nullement gênée par sa presque totale nudité. Nullement gêné par les étapes qu'elle franchit aujourd'hui. Car tu as tes propres démons toi aussi, Keith, et que c'est si excitant d'en être un peu l'exorciste.